samedi 26 novembre 2022

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LA CONSPIRATION DE L'OMBRE, Steve Berry

 

La conspiration de l’ombre, Steve Berry, Pocket 2022.  Notre ami Malone nous entraîne cette fois au cœur du combat politique actuel, en Allemagne. Il est chargé par un ancien Président des USA de veiller sur la sécurité de la Chancelière qui serait l’objet de menaces mystérieuses dans un climat tendu de campagne électorale. Régulièrement réélue, Oma, comme la surnomment affectueusement les Allemands, s’apprête à affronter Théodor Pohl, un candidat plus jeune et d’une autre sensibilité politique. Alors que la Chancelière représente le courant démocratique traditionnel qui a façonné l’Europe après 1945, son adversaire surfe de façon explicite avec les tendances populistes qui se profilent un peu partout sur le vieux continent. Et son nationalisme, teinté d’une nostalgie évidente pour le passé de la Grande Allemagne, semble séduire de plus en plus d’électeurs. L’enquête nous conduira à la fin du III ème Reich et nous amènera à nous interroger sur la fin d’Hitler et d’Eva Braun. Il semblerait que cette dernière, grâce à une habile substitution avec une employée du Bunker, ait pu s’enfuir, alors qu’elle était enceinte du Führer. L’homme clef de cette exfiltration, Martin Bormann, l’épousera alors qu’ils sont réfugiés en Amérique latine. On aura compris que ce thriller repose sur une hypothétique descendance et ses liens avec les deux candidats à la chancellerie. L’intrigue est comme toujours chez cet auteur bien ficelée et rythmée par des rebondissements qui décoiffent. Elle est aussi l’occasion de nous faire découvrir un véritable IV ème Reich, celui de la diaspora nazie dans des pays bienveillants comme le Chili, l’Argentine ou l’ex État Libre d’Orange.

mercredi 23 novembre 2022

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : PSYCHOSES NEURALES, Lois H. Gresh

 


Eh bien voilà la suite de Dimensions Mortelles, et quelle suite ! Sherlock Holmes vs. Cthulhu, Les Psychoses Neurales (Ynnis, 2021) est un véritable monument de gore cthulhuien. Lois H. Gresh continue de se lâcher avec ses machines monstrueuses, cette fois l’Esoshoker, sorte de chaise électrique mais qui ne sert pas uniquement à traiter les patients psychotiques. Elle est aussi utilisée comme drogue dispensée dans des salons glauques à de pauvres débris de l’humanité sur lesquels règne, en maître capitaliste, le Pr. Moriarty. Et, last but not least, elle ouvrirait la porte sur d’autres dimensions dans lesquelles vivent d’inquiétantes créatures. Des bestioles que l’on a déjà rencontrées dans le précédent roman dont la lecture me semble indispensable si on veut se retrouver dans cette « suite ». Laquelle s’ouvre en « dolby stéréo » par une attaque de créatures cthuluiennes contre un bateau de transport circulant sur la Tamise, bateau sur lequel se trouvent bien sûr nos deux détectives de légende. Ils parviendront à échapper au naufrage avec quelques dégâts collatéraux pour Watson qui se met à souffrir d’étranges visions. Vaincre ces entités ne sera pas une mince affaire, d’autant que l’Ordre de Dagon veille et qu’il n’est pas facile de faire rentrer leurs carcasses gélatineuses dans les jolis Esoshokers ! On restera sur sa faim, l’ouvrage se terminant en nous donnant rendez-vous à Innsmouth pour un troisième opus. Pour ma part, je ne suis pas pressé !


IN MEMORIAM, PAUL ROUELLE

 

 

 


 

Paul Rouelle s’en est allé ce mercredi 9 novembre, laissant une Colline qui regrettera toujours sa truculence à l’accent belge, ses bons mots pétillants comme des bulles de bière et la chaude amitié qu’il partageait sans parcimonie au gré de ses rencontres. Dentiste belge à Liège, il avait rencontré, par le plus grand du hasard de ses consultations, Philippe de Chérisey. Une rencontre qui le fera tomber dans la « soupe castelrennaise », la soupe savoureuse de l’époque de Gérard de Sède puis d’Henry Lincoln. Il venait souvent, lors de ses vacances, regoûter au potage avant de s’installer définitivement, l’heure de la retraite venue, dans son donjon au village. Avec sa chère et inséparable Nessie, ils étaient partout, toujours prêts à participer à la vie municipale et au commerce local, fait de gourmandises (restaurants) et de matière grise (librairies). Il savait aussi donner de sa personne et a largement participé à nos animations par ses conférences dont il nous a laissé maints écrits et de nombreux films [1]. Je n’ai évidemment jamais su ce qu’il pensait vraiment du fond de l’affaire, mais après quelques coupes de blanquette à l’Hostellerie de l’Évêché à Alet-les-Bains, il savait me murmurer à mi-mots : sociétés secrètes, conspiration, Plantard, manuscrits pas si faux que ça….

Va en Paix Paul, tu vas retrouver tous tes chers amis. Tu étais pour moi une personne rare, que tout le monde aimait. Je suis persuadé que le père-abbé de l’Abbaye d’Orval pour lequel tu avais beaucoup d’affection priera pour toi. Et j’adresse toutes mes condoléances et celles de ma petite famille à Nessie, bien seule maintenant alors que vous avez toujours été le modèle d’un couple uni. Nous pensons aussi avec sympathie à tes enfants et à tous tes proches.

 

Philippe Marlin

Nicolas

 




[1] Bibliographie succincte :

° numéro spécial de Top Secret sur Rennes-le-Château, une histoire d’Apocalypse (2004)

° Court-Circuit aux Éditions de l’œil du Sphinx (2010), préface d’Henry Lincoln.

° De nombreux articles dans Les Actes du Colloque Rennes-le-Château aux Éditions de l’œil du Sphinx.

° De nombreuses interviews dans des vidéos dont Documentaire exclusif (2010) et Les Zones d’Ombre de David Galley (2012)

° A étroitement collaboré à La Race Fabuleuse de Gérard de Sède, J’Ai Lu, 1973). La photo du Christ de couverture a été prise par lui à l’Abbaye d’Orval.


lundi 7 novembre 2022

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : DIEU, LA SCIENCE, LES PREUVES Bolloré & Bonnassies

 


 

Dieu, la Science, les Preuves, Michel-Yves Bolloré & Olivier Bonnassies (Trédaniel, 2021). J’ai éprouvé à la lecture de ce pavé le même sentiment de plaisir que celui ressenti en étudiant La Gnose de Princeton de Raymond Ruyer (cf 1972). Non pas pour une quelconque raison religieuse, mais parce que l’ouvrage est plein de joie et d’espérance, et parce qu’il est aussi extrêmement didactique, ce qui est toujours flatteur pour le lecteur ! La démonstration s’articule schématiquement en deux parties, l’une purement scientifique, la seconde sur d’autres natures de preuves.

La partie scientifique est assise sur la cosmologie dont il nous est tracé l’histoire toute récente en insistant sur les persécutions multiples dont ont été victimes, sous les régimes autoritaires, les savants partisans de la thèse de la création originelle. Oui, il y a eu big bang. Et la seconde loi de la thermodynamique nous apprend que l’entropie s’accroît avec le temps et qu’il y aura une mort thermique de l’univers. Et qui dit mort suppose qu’il y ait eu naissance. Les auteurs s’appuient sur les avancées récentes de la mécanique quantique tout en reconnaissant que le problème de la gravité quantique (contradiction entre une physique classique « déterministe » et une physique quantique « apparemment aléatoire ») n'a jamais été véritablement réglé. Nous sommes encore loin de la théorie du "Tout". Nous avons droit ensuite à toute une série de commentaires sur le rayonnement fossile, la constante de structure fine, la théorie des cordes, les multivers… Mais les parties les plus intéressantes, celles qui militent clairement en faveur de l’hypothèse d’un créateur sont celles qui ont trait à l’anthropie. Le principe anthropique nous indique qu’il y a intention dans la conception de la vie. La vie n’est pas un accident, elle n’est pas le fruit du hasard, elle n’est pas le produit fortuit de circonstances anormales. Elle est le résultat inévitable de la plus simple application de la physique ; l’univers est conçu pour créer la vie. Suivent une analyse sur ce fameux passage à la vie qui ne peut se résumer à un bouillonnement créatif de la boue originelle et une réflexion sur la naissance de la conscience qui semble avoir une existence autonome. Mais d’où viennent tous ces impératifs moraux inscrits au fond de nous-même et qui font que j’ai bonne ou mauvaise conscience ?

Puis, nos auteurs en viennent au Dieu chrétien, celui de la Bible, de la philosophie, des chapitres où c'est le raisonnement logique et l'interprétation personnelle qui l'emportent sur la preuve : le mystère de Jésus, montrant qu’il était bien le fils de Dieu ; le destin hors du commun du peuple hébreux qui, sans terre et sans leaders, se retrouvera (sans avoir perdu son langage originel) en terre d’Israël. L’Ancien Testament n’est pas qu’un recueil d’historiettes mythologiques. Pas plus que les apparitions de Fatima du reste, passées à la loupe par les deux contributeurs. C’est certainement la partie la plus faible de l’ouvrage, car clairement « engagée » et qui n’arrive pas à élargir son propos à d’autres religions que le christianisme.

Que l’on soit croyant ou pas, voilà un ouvrage qui en tout état de cause fait sérieusement réfléchir.

 


MARIE MAITRE ET LES TROMBONES

 


 

Marie Maitre et les trombones, c’est une relation qui vient de loin. Elle écrit en effet, dans son livre- témoignage Francesca, de la Douleur à l’Envol (EODS, 2021), faisant allusion à ses années de « bahut » :  pour tuer le temps durant les séances de travaux pratiques, elle adorait jouer avec des trombones, à la surprise de ses camarades et du professeur. Elle rêvait d’en faire des sculptures. Les accidents de la vie l’ont amenée à s’accrocher à la bouée de l’Art pour rendre un sens à son existence, et après un passage remarqué par la photographie, c’est tout naturellement qu’elle a retrouvé cet objet minuscule comme support de créativité. Quel choix étrange diront certains. Mais quels résultats obtenus sommes-nous contraints de constater. On ne peut que s’émerveiller en pensant aux longues heures de travail que consacre Marie à enfiler ces petites attaches pour les transformer en poupées, tombeaux et même en une jolie mare constellée de fleurs. Mais où est donc l’esprit de l’artiste en ces moments de « triturage » matériel, sinon dans le vide sidéral dans lequel aiment se perdre les artistes pour nourrir leur créativité ?

 


lundi 17 octobre 2022

JEAN HAUTEPIERRE PARLE DE LOS ANGELES

 

LOS ANGELES, ma nouvelle tragédie en vers, vient de paraître.
Dans cette pièce, la roulette n’est pas sans points communs avec le jeu de tarot – et le Grand-Œuvre alchimique, parce qu’il a été arrêté au milieu de sa course, délivre des pouvoirs qui sont autant de malédictions. Un croupier qui proclame les arrêts du Destin, une possession démoniaque lors d’une soirée gothique et un terrifiant orage qui recouvre tout l’horizon sont-ils les signes avant-coureurs de la damnation de Stello et de la mort du monde ? Des monstres, une descente aux Enfers, mais aussi de sublimes apparitions ponctuent cette œuvre qui se veut, avant toute chose (car il est ici une exigence suprême : celle du grand art), une évocation du Destin et des moyens de le dépasser.
Qu’importe si tu mens et si tu n’es qu’un songe
Qui s’évanouira dans le jour qui s’allonge,
Une étincelle, ardente étoile dans les cieux
Dont l’or évanescent fit un soir glorieux,
Car l’éblouissement de ta vive lumière
Me suivra jusqu’au seuil de nos heures dernières ;
Et si tout doit finir dans les flots du Léthé,
Tout ce qui fut et qui n’est plus, aura été.
LOS ANGELES est en vente au prix de 16 euros (12 euros + 4 euros de frais postaux). Pour l'acquérir, je vous recommande de me contacter par Messenger ou par mèl à jean_hautepierre@yahoo.fr
On peut aussi se procurer LOS ANGELES auprès des éditions de l’Œil du Sphinx, 36-42 rue de la Villette, 75019 Paris, ou auprès de différentes librairies (Darkland, 3 rue Sauval, 75001 Paris ; Vendredi, 67 rue des Martyrs, 75009 Paris ; La Nouvelle Librairie, 11 rue de Médicis, 75006 Paris,...) ainsi que sur AMAZON.

samedi 15 octobre 2022

MARIA DERAISMES DANS LA LETTRE DU CROCODILE

Maria Deraismes. Riche, féministe et Franc-maçonne par Fabienne Leloup. Editions de L’œil du Sphinx, 36-42 rue de la Villette, 75019 Paris – France.

www.oeildusphinx.com

 


 Maria Deraismes (1828-1894) reste une grande figure féministe de l’histoire maçonnique. Elle fonda avec Georges Martin ce qui devint l’Ordre maçonnique mixte international le Droit Humain. Malgré le rayonnement de cette obédience mixte, Maria Deraismes demeure insuffisamment connue. La réédition par L’œil du Sphinx de cette biographie romancée de Fabienne Leloup, publiée en 2015 aux Editions Michel de Maule, est bienvenue à l’heure du renouvellement aigu de la question centrale de la place des femmes dans la société.

Maria Deraismes fut une forte personnalité, particulièrement cultivée, très engagée dans les luttes pour la liberté, liberté de pensée, liberté de conscience, comme liberté du corps. Elle hérite de sa famille les idées voltairiennes et les visions de progrès sociétal de son père ainsi qu’une aisance matérielle qu’elle mettra à profit pour ses différents projets de vie.

Monique Leloup donne de l’épaisseur à la biographie de Maria Deraismes en choisissant l’écriture fictionnelle. Elle fait revivre au lecteur la période dans laquelle se situe l’action de Maria Deraismes, période complexe et dangereuse, Empire et IIIème République, pour une femme qui affronte les préjugés tenaces de la bourgeoisie et l’emprise de l’Eglise catholique. Elle s’attaque à toutes les formes d’inégalités et d’injustices, soutient les plus faibles, milite pour une égalité des droits des femmes et des hommes, pour la liberté de conscience et d’expression, pour un libre choix sexuel, pour le droit des animaux... Bref, elle dérange l’ordre établi alors même que le Pape Léon XIII s’attaque une fois de plus à la Franc-maçonnerie avec l’encyclique Humanum genus et que Léo Taxil lance sa traîtresse affaire anti-maçonnique. Les difficultés vinrent aussi de la résistance Francs-maçons peu ouverts aux idées qu’elle développe dans son journal. Peu à peu, les scandales s’estompent et elle trouve sa place dans la vie culturelle et politique française, une place qui reste fragile.

Elle a mis le Droit Humain sur les rails de la modernité maçonnique, en installa le principe d’unité qui lui permit de traverser le siècle dernier.

Cette travailleuse inlassable, qui souffrait de la maladie de Cronh, alors inconnue, est un exemple de courage et d’intelligence dans le combat pour les libertés individuelles et les droits civiques. Depuis la fondation de la première loge mixte « Le Droit Humain », un grand chemin a été parcouru sur les traces de Maria Deraismes. Toutefois, le combat pour les droits des femmes demeure actuel et plus que jamais nécessaire tant les forces hostiles à l’égalité entres les femmes et les hommes semblent se revigorer.

 

MAURICE MAGRE DANS LA LETTRE DU CROCODILE

 


 

La beauté invisible de Maurice Magre. Éditions de L’œil du Sphinx, 36-42 rue de la Villette, 75019 Paris – France.

www.oeildusphinx.com

Maurice Magre (1877-1941) est un peu oublié aujourd’hui et c’est grand dommage. Nous profitons de la réédition par les Editions de L’œil du Sphinx de l’un de ses plus beaux textes, La beauté invisible, publié en 1937, pour rappeler son importance.

Maurice Magre fut connu pour sa défense infatigable de l’Occitanie et du catharisme qu’il sortit de l’oubli. Avant tout poète, il ne faut pas chercher dans les écrits très nombreux de Maurice Magre la rigueur de l’historien, même s’il s’appuie sur des faits historiques. Il cherche avant tout à faire vivre les mythes et à mettre en évidence leur puissance cathartique.

Libertaire assumé, Maurice Magre défraya la chronique dans sa jeunesse et fut qualifié de « débauché » ce qui n’empêcha pas la reconnaissance de son talent d’auteur. Il s’intéressa à l’ésotérisme occidental, au catharisme bien entendu mais aussi à la théosophie de HP Blavatsky, au martinisme, au druidisme et à tous ces courants qui connurent un développement au début du siècle dernier. Il s’intéressa aussi aux courants orientaux dont le bouddhisme et l’hindouisme de Sri Aurobindo.

Son œuvre s’orienta vers de nombreux sujets sous la forme d’essais, de recueils de poésie, de romans ou de pièces de théâtre. Elle fut influencée par ses expériences dans le domaine de la sexualité et des drogues tout autant que par une spiritualité profonde. Il fut un penseur sans concession et un explorateur sans illusion du continuum qui va de la chair à l’esprit mais, toujours capable de réenchantement.

Jouant avec bonheur au cœur des mythes pour réordonnancer les mythèmes de manière créatrice, Maurice Magre a laissé une œuvre de sens qui mérite l’intérêt.

Quand Maurice Magre rédige La beauté invisible, il se nourrit de ses nombreuses incursions dans le monde de l’invisible et de ses tentatives pour saisir et comprendre les hiérarchies invisibles qu’il pressent et ressent.

Il évoque la communication avec la nature qui l’habite depuis l’enfance. La grâce et la beauté sont centrales dans sa recherche.

« La beauté est peut-être proportionnelle à certaines capacités de l’univers dans lequel nous sommes. Une vaste échelle d’univers doit exister, sur laquelle nous nous élevons grâce à notre désir de nous élever et il doit y avoir d’autres mondes où la beauté est plus riche et plus permanente, où elle jaillit naturellement, où elle est une commune propriété des choses que les habitants de ces mondes perçoivent sans effort, par une communication directe. »

La beauté est le vecteur privilégié de la découverte du plan divin. Qui cherche davantage de beauté s’élève vers le divin. C’est par petites touches, nées de l’expérience plutôt que du concept, que Maurice Magre peint l’invisible afin qu’il se révèle en ses multiples possibilités. Il recherche une nouvelle alliance avec la nature, par la beauté et l’attention simple, alliance qui reste à établir.

Il convoque, pour les interroger de grandes figures, de grandes âmes, conscient toutefois de leur côté sombre, Socrate, Platon, Empédocle, Epicure, Epictète, Bouddha, Nanak, Luther, Spinoza…

C’est en partant du désespoir, véritable matière de l’œuvre de lumière que Maurice Magre prend son envol vers les mondes invisibles, passant par la « montagne de la sérénité ».

« On a prescrit, observe-t-il avec justesse, des méthodes plus ou moins longues à suivre, des purifications du corps et de l’âme, plus ou moins rigoureuses. Mais même sans pratiquer aucune méthode, en se présentant avec son impureté naturelle et son espérance à l’orée du monde invisible, on peut entendre une parole, voir un visage, une image grotesque ou terrible qui donnent la certitude qu’il y a une merveilleuse vie à découvrir. »

Il descend dans la douleur et l’obscurité pour mieux saisir la beauté et la solarité.

« La plus parfaite beauté habite les taudis, hante les prisons et les bagnes. Elle est dans l’alignement des lits d’hôpitaux, c’est elle qui s’exhale dans la sueur de sang des esclaves, de ceux qui sont enchaînés au travail, à l’alcoolisme, au remords du mal qu’on a fait. Mais cette beauté, il faut savoir la reconnaître, il faut avoir des yeux intérieurs pour la percevoir, car elle est invisible. »

Cette beauté-là, de nature non-duelle, présente dans la dualité la plus lourde est un feu alchimique qui libère. Le combat est inégal pour celui qui veut l’extraire pour en faire une boisson d’immortalité mais ce combat n’est jamais vain.

 

samedi 8 octobre 2022

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LA VOIE MAUDITE, François Lange

 


 

Tout finit par arriver et, dans La Voie Maudite (François Lange, Palémon 2022), notre excellent limier quimpérois, Fañch, tombe amoureux d’une mystérieuse pharmacienne qui vient de s’installer dans la vieille ville. De quoi donner du piquant à une enquête sur trois meurtres atroces, commis sur des propriétaires terriens dont le point commun est de posséder des biens sur le tracé de la future ligne de chemin de fer. Le final de la voie destinée à désenclaver la cité bretonne en la reliant à Paris. L’affaire sera résolue grâce à l’aide d’un enquêteur de la Compagnie des Chemins de Fer et nous fera partager les lourds secrets d’une vieille famille locale très attachée à un passé douloureux enfoui dans la terre. Ce nouvel opus est moins gourmand que les précédents. On aura juste droit à une omelette au lard bien baveuse et à un bœuf miroton fort odorant (mi pot au feu, mi rôti) dans une taverne locale. Mais l’auteur, par ailleurs très versé dans l’affaire de Rennes-le-Château, ne pourra s’empêcher de parsemer son récit de petites truffes noires du Razès. C’est ainsi que l’épouse de l’une des victimes va partir pour se ressourcer dans un petit village de l’Aude, Espéraza. C’est également le père jésuite Alexandre, ami du policier, que nous retrouverons, lors d’une visite de ce dernier, en plein travail de décodage du Codex Bezae. Les saunièrologues avisés comprendront ici l’allusion faite aux parchemins mystérieux qui auraient été découverts par « le curé aux milliards » !


lundi 3 octobre 2022

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : AKIRA BACK

 

 


J’utilise rarement un tel qualificatif. Mais le nouveau restaurant du Prince de Galles (33 avenue Georges V, Paris 8) Akira Back frôle vraiment l’excellence. Il fait partie de cette nouvelle race de restaurants japonais haut de gamme où de jeunes chefs nippons déploient d’étonnantes palettes de créativité. La salle est très sombre, dans l’esprit d’un décor à la Philippe Starck, et le service est d’une attention discrète, mais toujours efficace. Seul bémol, une pauvrette sur une estrade qui n’en finit plus de se déhancher maladroitement en guise de DJ (totalement inutile) ! 

 




Nous étions deux et les plats ont été déposés au milieu de la table afin que chacun puisse profiter de tous les mets. En guise d’ouverture, un véritable chef d’œuvre : une micro pizza croustillante à souhait, garnie de champignons japonais et de sublimes tranches de truffe (je dis tranches et pas copeaux). Suivra un carpaccio de Saint-Jacques au yuzu, un beau pavé de saumon laqué et des beignets de homard aux saveurs étonnantes. Une mention particulière à l’accompagnement, un riz veggie farci d’herbes improbables. Je me suis contenté en dessert d’un assortiment de mochis glacés. Inutile de dire que la carte des vins est à la hauteur ; nous nous sommes contentés d’un sancerre rouge gouleyant.

 



 

(Note de mon banquier : attention, à ne pas fréquenter tous les jours !).