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Carcassonne : les livres de la bibliothèque... à la benne
POLÉMIQUE
Carcassonne : les livres de la bibliothèque... à la benne
De vieux exemplaires de la Revue de Paris. Des chroniques scientifiques des années 30 à 50, des romans. C'est le fonds dans lequel les passants pouvaient librement puiser, hier, devant la porte de la bibliothèque, à Carcassonne. Dans le cadre du déménagement des collections entamé début août, ces ouvrages, mis au rebut, étaient livrés au public dans une benne à chantier. "Leur évacuation a été décidée sur des critères concrets, du fait de leur usure ou des champignons qui s'y sont développés", a indiqué un responsable, selon lequel il ne s'agit que d'une petite partie du fonds. Certains ont été scandalisés, le président de l'Académie des arts et sciences évoquant un véritable "autodafé".Carcassonne. Des livres de la bibliothèque jetés à la benne provoquent un petit scandale !
17/08/2011 à 15h51 | 2015 vues | 2 réactions
Hier, dans la rue de Verdun, devant la bibliothèque d'agglomération, on avait placé une benne remplie de vieux livres (revue de Paris. Des chroniques archéologiques, d'autres ouvrages scientifiques des années 30 à 50 et quelques romans). Les passants pouvaient donc se servir, rapporte L'Indépendant.
C'est dans le cadre d'un déménagement des collections, commencé au mois d'août que ces livres ont été mis au rebus. Mais c'est une idée qui n'est pas appréciée par tout le monde, toujours selon ce journal.
Selon le Directeur du « réseau des médiathèques de l'agglomération », le contenu de ces ouvrages serait obsolète et ne correspondrait donc plus « à la mission de service public qui consiste à fournir de la connaissance et de l'information »... Il ajoure que les livres jetés sont usés ou touchés par des champignons... Il précise encore : « cela représente une toute petite partie de notre fonds. Les livres les plus précieux ont été conservés et feront l'objet d'un dépoussiérage et d'une décontamination ».
Quelques bibliophiles carcassonnais ont ét bien contents de récupérer des livres, soit pour la décoration de la reliure, soit pour le contenu en ce qui concerne une professeur de lettres.
D'autres personnes ont été scandalisées, comme le Président de l'Académie des arts et sciences de Carcassonne qui considère que « c'est un autodafé » ! Même si ces livres n'avaient pas un intérêt scientifique, il considère qu'ils en avaient un pour des sociétés savantes ! En colère, il va prévenir le Ministère de la culture et écrire au Président de la communauté d'agglomération pour que la personne responsable soit démissionnée...
Le Président de la communauté d'agglomération a reconnu ce matin que « c'était une maladresse » et il a justifié l'affaire ainsi « cette initiative aurait été prise par les personnes assurant l'interim du conservateur pendant ses congés ».
Carcassonne. Bibliothèque : conflit autour des revues jetées
bibliothèque
Depuis vendredi, la bibliothèque de l'agglo a terminé le déménagement de son fonds vers le chemin de Montquiers. Hier,il ne restait plus qu'à jeter des revues jugées obsolètes, mais l'opération a été pour le moins mouvementée.
Hier matin, quelques passants intrigués piochaient au hasard dans la benne remplie de livres située rue de Verdun, devant le musée. En prime, certains bibliophiles ont pu assister à une scène digne de Molière…
Les employés de la bibliothèque terminaient de vider les locaux (voir notre édition du 10/08) en jetant dans la benne divers ouvrages destinés au recyclage - des revues scientifiques pour la plupart.
« Une opération normale et courante dans les bibliothèques », assure le conservateur Emmanuel Pidoux. Gérard Jean n'était visiblement pas du même avis. Le président de l'Académie des arts et des sciences de Carcassonne est intervenu, furieux. « Il m'a abordé d'une manière très agressive, affirmant que c'était le plus grand scandale qu'ait connu le département depuis un demi-siècle », relate le conservateur.
Gérard Jean estime que « 10 000 livres, d'une valeur historique indéniable » ont été jetés. Pour Emmanuel Pidoux, il n'y a pas lieu de faire polémique. Selon lui, « il y avait environ deux cents documents, des revues scientifiques obsolètes et souvent délabrées pour la plupart. » Il est d'autant plus étonné que le déménagement vise justement à mettre en valeur la collection de la bibliothèque. « Cela ne représente même pas 1 % des 40 000 documents déménagés et conservés. De plus, certaines revues étaient attaquées par des champignons qui risquaient de contaminer le reste de la bibliothèque. Le tri était urgent car il n'avait pas été fait depuis longtemps. C'est notre devoir de présenter des collections actualisées et propres. »
Très remonté, Gérard Jean a contacté La Dépêche pour s'exprimer, allant jusqu'à qualifier l'événement d'« autodafé ». « C'est le fait du prince ! Cette destruction de bien public a été décidée sans préavis ni concertation. » L'homme regrette notamment qu'on n'ait pas proposé à des sociétés « plus que centenaires » comme celle dont il est président ou encore la Société des études scientifiques de l'Aude (Sesa) de récupérer les ouvrages. Il aurait même retrouvé dans la benne des ouvrages dont l'Académie des arts et des sciences avait fait don à la bibliothèque.
Recommandé A.R. Carcassonne, le 17 août 2011
Lettre ouverte de protestation solennelle.
Monsieur le Président
La bibliothèque municipale et ses riches collections, se trouvent désormais sous la
gouvernance de la Communauté d’agglomération du Carcassonnais dont vous êtes
le président.
Vous occupez la fonction d’adjoint, chargé de la Culture, auprès de M. Jean-Claude
Pérez, député-maire de Carcassonne ; et vous êtes d’autre part vice-président du
Conseil général de l’Aude, plus particulièrement chargé des Affaires culturelles.
Vous ne pouvez donc pas ignorer qu’il existe dans notre département, comme sur
l’ensemble du territoire français, un réseau de sociétés savantes, à vocation littéraire,
artistique, historique et scientifique, fondées pour certaines en 1833 et 1836, dont la
mission de service public est essentielle, renforcée même par la défense environnementale
et patrimoniale.
Il serait surprenant que vous ne sachiez pas que la Société des arts et des sciences
de Carcassonne, appelée aujourd’hui Académie, a créé il y a près de cent cinquante
ans, le musée des beaux-arts, ainsi que la bibliothèque municipale de cette ville. Elle
a permis de façon décisive la sauvegarde des ruines de la Cité, et plus récemment,
en grande partie, son classement parmi les monuments les plus prestigieux inscrits
au Patrimoine mondial de l’Humanité.
Pendant plus d’un siècle, nos prédécesseurs ont inlassablement enrichi par leurs
nombreux achats personnels et leurs donations de grande valeur successives, le
fond alors embryonnaire de la bibliothèque municipale de Carcassonne.
Plus récemment, la Société des arts et des sciences de Carcassonne, a déposé un
certain nombre d’ouvrages parmi les plus rares et les plus précieux, au sein de
l’institution territoriale que vous représentez maintenant, avec la certitude de les
protéger ainsi à perpétuité.
Nous avons vécu ensemble dans la matinée d’hier un « bibliocauste » à ma connaissance
sans précédent, qui a dépassé de par son importance les scandales culturels
des cinquante dernières années dont le département a souffert.
Le jeune conservateur Emmanuel Pidoux, que vous m’avez présenté comme directeur
du centre de lecture publique, chef de projet du réseau des médiathèques de
l’agglomération du Carcassonnais, a provoqué la destruction de 7 à 8.000 ouvrages1
d’une valeur documentaire considérable.
Il s’agit là d’un acte barbare, constitué par la destruction de milliers de livres d’une
haute portée intellectuelle, qu’il nous appartient de dénoncer de la façon la plus
violente qui soit… qu’il vous appartient de sanctionner sans aucun état d’âme.
Nous vous demandons solennellement, Monsieur le Président, d’engager immédiatement
une procédure de licenciement à l’encontre de M. Emmanuel Pidoux,
s’il s’avère responsable de l’état de fait ; sinon, nous envisagerons des poursuites
pénales visant toute personne concernée pour destruction volontaire du bien public
et d’objets mobiliers historiques.
D’après les renseignements qui ont été portés à ma connaissance, il semblerait que
M. Pidoux ait agi sans aucun discernement, avec un manque de réflexion manifeste,
aggravé par une absence totale de concertation, qui peut être justifiée mais non
amoindrie, en raison de sa méconnaissance des réseaux associatifs culturels départementaux.
Pour défendre son geste inqualifiable devant les médias, M. Pidoux a menti sur la
portée de sa décision inculte, sur son envergure, ce qui laisse présumer la dangerosité
de votre collaborateur, qui n’a même pas daigné présenter ses excuses à
l’Académie des arts et des sciences de Carcassonne.
Afin d’éviter toute polémique stérile qui pourrait s’instaurer, je me permets de
vous rappeler les faits objectifs que nous avons ensemble constatés puisque vous
étiez personnellement présent. Mes collègues et moi-même avons recueilli un
échantillonnage des livres les plus importants voués à la destruction et pris des photographies
in situ.
Le mardi 16 août 2011, au milieu de la matinée, j’ai été prévenu téléphoniquement
par un nombre conséquent de personnes ouvertement scandalisées par ce qui se
passait « rue de Verdun ».
Je me suis donc rendu à l’emplacement de l’ancienne bibliothèque municipale. À
l’entrée, sur le trottoir, se trouvait une grande benne à ordures, du type de celles qui
sont utilisées pour l’évacuation des matériaux de construction.
À mon arrivée, ce container était quasiment plein à ras bords ; il contenait donc un
minimum de 7 à 8.000 ouvrages selon l’estimation susdite et non pas « 200 revues »
comme il m’a été donné de le lire sur une certaine presse locale.
Ce chargement destiné de prime abord à la décharge publique a été très vite accaparé
par des personnes bien intentionnées, qui ont tenté de sauver ce qui pouvait
l’être, mais également par des bouquinistes et autres brocanteurs très au fait de la
valeur marchande du dépôt.
Qu’avons-nous trouvé : des documents sans importance bien entendu ; mais
également des livres en parfait état, bien reliés, ayant appartenu aux précieuses
bibliothèques de feux Coste-Reboult, de René Nelli, du médiéviste Jean Duvernoy,
du philosophe Ferdinand Alquié, de la Société des arts et des sciences de Carcassonne
entre autres et à titre d’exemples ; des ouvrages portant les dédicaces à
Mahul, à Chénier, à Marcou, à Blum, député de l’Aude. Il y avait également des
collections complètes et reliées du Bulletin monumental de la Société française
d’archéologie ; les Annales climatologiques de l’Aude ; les Actes des congrès nationaux des
sociétés savantes ; les prestigieux et très recherchés ouvrages des Congrès archéologiques de
France ; Les Annales, littéraires, historiques, scientifiques ; La Revue des deux Mondes,
recueils immémoriaux des célébrités intellectuelles de notre Pays ; des documents
originaux du XIXe siècle, voire du XVIIIe siècle.
Broutilles nous a-t-on dit ! Circulez, il n’y a rien à voir ; il n’y a plus rien à faire, le
fait du prince est accompli !
Nous citoyens, écrivains, éditeurs, enseignants, chercheurs, membres des sociétés
savantes, littéraires et scientifiques, politiciens et autres acteurs de la société civile,
voulons témoigner notre indignation face à cet acte de barbarie d’un autre siècle
que constitue la destruction de milliers de livres.
En effet, si nous concevons à l’extrême limite qu’une institution comme la Bibliothèque,
future médiathèque de la Communauté d’agglomération de Carcassonne, ne
puisse conserver pour des raisons de place ou d’aléas budgétaires les donations de
l’État, où celles des plus prestigieux de nos compatriotes, nous ne pouvons accepter
que les livres finissent leur existence à la poubelle, ni tolérer les dires de ceux qui
affirment que « Balzac » n’a plus sa place sur les rayonnages, parce qu’il ne fait plus
partie du cursus scolaire.
Monsieur le Président, votre collaborateur a détruit une partie du patrimoine cher
aux Carcassonnais et aux Audois. Nous en sommes tous révoltés. C’est pourquoi,
au nom de la sphère culturelle départementale émotionnée par ce problème, je vous
demande d’engager immédiatement une procédure de licenciement visant la personne
qui s’est rendue coupable devant nous, de faits dramatiquement irréversibles.
Et parallèlement à cette lettre de protestation solennelle que je rends publique, j’avise
Madame le préfet de l’Aude et Monsieur le ministre de la Culture, afin qu’il
fasse diligenter une enquête déterminant en particulier qu’elles sont les
compétences universitaires et professionnelles de Monsieur Emmanuel Pidoux et
partant, les conditions de son embauche.
Je conserve l’espoir de ne plus avoir à gérer pareille situation, que je n’avais jamais
connue alors que je milite bénévolement depuis cinquante ans en faveur de la
Culture et du Livre en particulier.
Au nom de l’ensemble de mes collègues, je vous exprime l’expression de ma
consternation et de mon profond regret.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués.
Gérard JEAN
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