LA DEPECHE
Montségur et sa région
Publié le 10/07/2012 08:12
Michel Roquebert a vécu avec les martyrs de Montségur
Un trésor du Sud vu par... (1/6)
Il les connaît tous. Comme des voisins, des amis, des familiers. Le tailleur, dont il a peut-être retrouvé les ciseaux, en fouillant dans les vestiges du vieux village. Le meunier, le chevalier, l'arbalétrier… Michel Roquebert est devenu le familier du clan qui vivait à Montségur il y a huit siècles. Il nous raconte…
Comment vous êtes-vous intéressé à Montségur ?
Je travaillais dans un journal de Bordeaux où un vieux journaliste avait évoqué ce lieu, avec des idées assez fantasmagoriques : « Si vous allez à Toulouse, allez visiter Montségur et ses 3000 marches qui mènent jusqu'au lac sacré des Cathares ! » Ces 3000 marches n'ont jamais existé, mais le lieu était chargé de toutes sortes de légendes ésotériques datant des années 1900 : château du Graal, temple solaire… Tout cela m'a beaucoup impressionné !
Votre premier contact ?
Je suis allé en reportage à Montségur au début des années 60 pour rendre compte de fouilles archéologiques dans l'ancien village. À l'époque, personne ne s'intéressait aux châteaux cathares. Je me souviens que j'avais demandé mon chemin à un paysan, alors que je cherchais le château de Peyrepertuse : « Qu'est-ce que tu veux faire là-haut, m'a-t-il demandé, il n'y a que des cailloux ! » Aujourd'hui, il y a des routes, des parkings, des péages !
Et vous avez écrit « Citadelles du vertige » en 1966…
Oui, et à cette époque, la télévision a diffusé le film de Stellio Lorenzi sur les Cathares… Cela a provoqué une énorme émotion en France ! Du coup, la directrice de la Dépêche, Mme Evelyne-Jean Baylet, m'a demandé de me consacrer entièrement aux Cathares, pour raconter cette histoire à raison d'une demi-page chaque jour dans La Dépêche !
C'est comme cela que vous vous êtes immergés dans le catharisme ?
Je me suis plongé dans des documents inédits, que l'on avait jamais consultés. J'avais la chance de lire le latin, je suis retourné à la faculté, j'ai consulté les archives. J'ai retrouvé des familles entières de Parfaits, leurs ancêtres, leur lignée, leur profession, leur vie… Et j'ai ainsi pu écrire cette « Épopée cathare » en cinq tomes, cela m'a pris près de 30 ans ! Dès ma retraite, en 1983 je m'y suis entièrement consacré. J'ai même habité dix ans à Montségur ! J'ai pu identifier formellement soixante-huit personnes sur les deux-cents vingt-trois brûlés de Montségur. Et depuis, on n'a pas trouvé un seul élément à ajouter, j'ai ratissé tout ce qu'il y avait dans les documents. Pour résumer, s'étaient rassemblés à Montségur tous les hommes du clan valides pour la bataille contre l'Inquisition.
Montségur était devenu le QG de la résistance cathare ?
Oui, j'ai pu reconstituer les dix mois qu'a duré le siège. Les attaques, les escalades, les progressions, les reculs, jusqu'à la reddition. J'ai pu revivre la vie de ces personnages dont certains sont allés jusqu'au bout de leur foi, refusant de renier leur religion en sachant qu'ils allaient monter sur le bûcher, comme la femme et la fille du seigneur. Je les connais tellement que cela est devenu pour moi très émouvant…
Michel Roquebert
Michel Roquebert a été journaliste à La Dépêche du Midi jusqu'en 1983, comme responsable de la rubrique des Arts et Spectacles.Son premier livre sur le Catharrisme date de 1967 : «Citadelles du Vertige». Suivront ensuite les quatre tomes de l'Epopée cathare, (Grand prix d'histoire de l'Académie française) de 1970 à 1989.
Il a ensuite écrit des ouvrages sur la religion cathare, Saint-Dominique, Simon de Monfort, les Cathares et le Graal. Ses œuvres sont régulièrement rééditées et enrichies.
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