Et bien voilà un livre dont un livre est le héros. Ian
Caldwell et Dustin Thomason, dans La
Règle de Quatre (Michel Lafon, 2005), mettent en scène un monument de la
littérature mystérieuse, le fameux Hypnerotomachia
plus connu sous le titre de Songe de
Poliphile. Publié en 1429 à Venise par Alde Manuce, cet ouvrage est
attribué à l’italien Francesco Colonna, du moins si on rassemble les premières
lettres de chaque chapitre pour découvrir l’identité de l’auteur. Voilà qui
commence bien et qui est du reste une première matière à polémique, certains
érudits attribuant la paternité de ce travail à un moine obscur. Il s’agit, à
première lecture, d’un conte d’amour totalement indigeste, entrecoupé d’apartés
érotiques et de pensums architecturaux très fouillés. À tel point que l’ouvrage
sera la coqueluche de nombreux architectes florentins et romains qui y
puiseront leur inspiration. Pour d’autres, il s’agit d’un récit ésotérique
crypté, véritable référence notamment chez la fameuse Société Angélique.
Dans le cadre de l’université de Princeton, le thriller met
en scène un groupe de chercheurs érudits, bien décidés à percer le secret de
l’ouvrage. Une quête sans merci, sur fond de jalousies, de besoin éperdu de
reconnaissance pouvant aller jusqu’au plagiat par un professeur des travaux de
l’un de ses étudiants plus avancé que lui dans la recherche. Les dégâts
collatéraux sont nombreux : meurtres en série, ou plus classiquement explosions
violentes au sein de certains couples où le livre a pris une importance
démesurée.
Le travail de décryptage mené est passionnant et aboutit à
la conclusion que Colonna avait construit une cache gigantesque pour abriter
« quelque chose de fabuleux ». Et ce « quelque chose » pour
une fois n’appartient pas à la famille des lourds secrets susceptibles de faire
trembler l’Église. Sans tout dévoiler, disons simplement que nous sommes dans
le registre de la culture et de l’art.
Un très bon bouquin ; lorsque je l’ai fermé, je n’ai
pas dit comme souvent « excellent, je me suis bien amusé », mais « excellent,
c’est fou ce que j’ai appris ! ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire