C’est d’après un simple calendrier
maya que cette incroyable histoire digne d’Orson Wells ou d’Howard
Philips Lovecraft est devenue l’un des sujets « fantastiques » les plus
courus sur les sites internet et autres blogs cherchant à s’attirer une «
clientèle » en recherche d’angoisses et de sensations fortes. C’est
évidemment aux Etats-Unis que cette théorie loufoque est née en 1975, se
développant lentement jusqu’à la fin des années 80. En 2009, après le
succès mondial du film catastrophe 2012 lui-même tiré du best-seller de Steven Alten Le Testament maya, la théorie est sortie de son cadre folklorique pour devenir presque une réalité, faites vos prières Mesdames et Messieurs !
C’est ainsi que selon plusieurs enquêtes, notamment une réalisée par l’agence Ipsos
qu’un peu plus de 10 % des habitants de notre Terre pensent que la
prédiction est réelle et que nous allons donc disparaître un certain 21
décembre 2012. 10 % de l’humanité… une bagatelle de 600 millions de
Terriens qui se préparent donc à finir leurs jours le 21 décembre
prochain pour le « grand feu d’artifice final ». Cette enquête démontre
surtout à quel point l’homme a soif finalement de se faire peur, de se
penser en danger, obsédé par sa disparition, un grand enfant qui
regarderait un film d’horreur en cachette mais qui serait au fond
vraiment effrayé.
En dehors du phénomène social,
psychologique et sociologique, la fin du monde il faut le dire a
toujours eu un immense succès. L’An mille avait terrifié des populations
entières, des prophètes, voyants ou d’autres illuminés s’étaient
répandus à travers l’Europe, ils eurent d’ailleurs toujours une bonne
place et bon accueil, du moins dans une certaine frange de l’opinion
publique. La France n’a point échappé à cet attrait morbide pour la fin
de l’humanité. Et nous avons pour ainsi dire notre « produit national »,
et pas des moindres. Il s’agit de Michel de Nostredame, le fameux
Nostradamus qui nous a laissé plusieurs centaines de quatrains. Encore
aujourd’hui ils intriguent et des générations de chercheurs plus ou
moins farfelus se sont penchées sur ses écrits.
Là
encore, des « spécialistes » avertis ont accouché de thèses toujours
plus avant-gardistes. Dans les années 80, bien entendu le scénario était
celui d’une 3ème Guerre mondiale contre l’épouvantail de l’URSS et du
Pacte de Varsovie. Aujourd’hui la confrontation avec le monde musulman
aurait la préférence. Chaque époque voit naître de nouveaux spécialistes
de Nostradamus qui sans jamais avoir percé son secret (existe-t-il
vraiment un secret ?), réécrivent l’histoire future au fur et à mesure
que les quatrains sibyllins semblent correspondre même de loin à
quelques-unes des allusions du « visionnaire » qu’était Nostradamus.
Etrangement, aucun de ces éminents chercheurs, malgré les annonces plus
ou moins prudentes de catastrophes et autres pandémies, n’est remis en
question par ses lecteurs, inlassablement l’homme revient à sa soif de
sensationnel.
Peu importe d’ailleurs notre fin à
tous, en témoigne le couturier Paco Rabanne, éternel farfelu qui nous
annonçait au moment de l’éclipse de 1999 la chute de la station Mir en
plein sur Paris tuant des milliers de personnes, l’homme que le ridicule
n’a pas tué, poursuit un parcours normal en surfant toujours avec le
paranormal. Le marché de l’Apocalypse, lui poursuit également son
chemin, l’éculé Nostradamus ne pouvait résister au charme de l’exotisme
de la prédiction des Mayas. C’est qu’il s’agit également d’un gros «
business » qui selon les circonstances peut rapporter beaucoup d’argent.
Du grigri à l’abri antiatomique, de l’équipement de survie à la pierre
protectrice de Bugarach, les marchands de surnaturels sont actuellement
dans un âge d’or.
Pour s’en convaincre il n’y a qu’à
feuilleter l’un de ces hebdos gratuits où vous trouverez à la page des
petites annonces, tout un lot de sorciers et chamans, voyantes et
magiciens qui après vous avoir délesté de quelques euros vous
apporteront bonheur, amour et richesses aussi facilement que ce fameux
calendrier maya nous enverra tous Ad Patres. Il y a toutefois un endroit
où les habitants de notre planète, selon une légende probablement
franco-française, seront épargnés, Bugarach, un minuscule village de
l’Aude… C’est ici selon les croyances véhiculées par Internet que le
cataclysme épargnera quelques miraculés. Les Bugarachois, qui étaient au
nombre de 189 d’après le recensement de 2007, se passeraient bien d’une
telle publicité. Il est probable qu’au soir du 20 décembre, la
population du village aura augmenté en flèche !
En
effet ces dernières années des cohortes de curieux s’y sont pressées, au
point que le lieu a été mis sous surveillance par la Miviludes, la
Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires… Qui eut cru, qu’un simple et banal calendrier maya serait à
l’origine de la célébrité d’un paisible village du Languedoc-Roussillon
dont les habitants verraient leur tranquillité menacée par la diffusion
massive d’informations loufoques sur une éventuelle fin du monde ! Nous
nageons en pleine science-fiction, le roman étant toutefois de piètre
qualité. En attendant la théorie a encore quelques semaines à vivre, le
ciel n’est pas encore prêt à tomber sur notre tête !
Certains
ont toutefois déjà pris le virage… en indiquant que le calendrier
n’aurait pas été correctement interprété, la fin d’un cycle pour les
uns, une erreur de date pour les autres, les mêmes mécanismes que pour
l’insondable Nostradamus sont en marche. Il est à parier que nous
assisterons à l’arrivée de très nombreux autres produits de ladite
prédiction, tandis que ces Américains qui ont construit des abris de
survie bourrés de provisions et de systèmes de support-vie pourront
toujours se consoler en se disant que la fin du monde cela sera
peut-être pour demain… ou après-demain ? /L
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