Le Cauchemar d’Innsmouth (1931, 1936 in Visionary Cie sous forme de livre)
Le
narrateur, Robert Olmstead[1],
amateur de civilisation ancienne et venant de fêter sa majorité, entreprend un
voyage à travers la Nouvelle-Angleterre afin d'en apprendre un peu plus sur ses origines.
Innsmouth... C'est le hasard qui m'y
conduisit, durant cet été où je fêtais ma majorité en parcourant la Nouvelle-Angleterre.
Je voulais me rendre à Arkham, mais le prix du billet de train me fit hésiter.
C'est alors que l'employé des chemins de fer me parla de ce vieil autobus, que
presque personne n'empruntait. Parce qu'il passait par Innsmouth... Mais pourquoi
les gens évitaient-ils cet ancien port de pêche, comme si ses habitants avaient
la peste ?
Son enquête préalable
le mène à Newburyport, où il consulte les archives de la bibliothèque. Il y apprend que le village a été
décimé par ….. la grande épidémie de
1846, qui a emporté plus de la moitié des gens d’Innsmouth. On n’a jamais su
exactement de quoi il retournait ; ça devait être une maladie étrangère
rapportée de Chine ou d’ailleurs par les bateaux. En tout cas ça a fait du
vilain : il y a eu des émeutes et toutes sortes d’horreurs dont la ville, je
crois, n’a jamais été délivrée et elle ne s’en est pas remise. Il ne doit pas y
vivre aujourd’hui plus de trois cents ou quatre cents habitants. Dans le
musée de la Société Historique locale, il découvre également une étrange tiare,
ornée de symboles repoussants.
Il prend alors le
vieux bus brinquebalant, son projet étant de faire une halte « touristique »
à Innsmouth et de rentrer à Arkham le soir.
Il est le seul passager et le
chauffeur, un certain Joe Sargent, lui inspire le dégoût par son physique
répugnant. Après avoir longé une côte déserte, il arrive dans la cité et dépose
sa valise au seul hôtel de l’endroit, la pension Gilman. Les habitants sont
rares, bizarres et peu loquaces. Il trouve une épicerie tenue par un jeune
homme venu d’Arkham qui lui griffonne un plan de la cité et le briefe
rapidement.
Il n’y a plus à Innsmouth qu’une raffinerie d’or, tenue par la
famille Marsh. L’endroit est très poissonneux, notamment dans les parages du
Récif du Diable.
Et un étrange culte s’est installé au détriment des églises
locales. Il ne fallait pas, par exemple,
traîner près de l’affinerie Marsh, ni autour d’aucune église encore active ou
de la salle à colonnes de l’Ordre de Dagon, à New Church Green. Ces églises
très singulières – toutes formellement désavouées ailleurs par leurs
confessions respectives – adoptaient, à ce qu’on disait, les rituels et les vêtements
sacerdotaux les plus bizarres. Leur credo hétérodoxe et mystérieux faisait
entrevoir de prodigieuses métamorphoses qui menaient à une sorte d’immortalité
du corps, sur cette terre même. Le pasteur du jeune homme – le Dr Wallace
d’Asbury M. E. Church d’Arkham – lui avait solennellement recommandé de ne fréquenter
aucune église à Innsmouth.
Le narrateur
entreprend la visite de la ville. Lovecraft nous offre ici de nombreuses pages
de description, dignes d’un véritable guide touristique.
Il rencontre le vieux
Zadok Allen, recommandé par l’épicier pour ses bavardages sur l’histoire de la
ville, moyennant une bouteille de whisky frelaté. Et ce qu’il apprend est
stupéfiant. Le capitaine Obed Marsh s’était acoquiné avec des indigènes lors de
ses périples austraux et faisait un trafic de bijoux en or fournis par ces
derniers, refondus dans sa raffinerie. Ces indigènes, créatures mi-aquatiques
se montrèrent de plus en plus exigeants, réclamant des sacrifices humains …. et
finirent décimés par une peuplade insulaire révoltée par leurs pratiques. De
retour dans un Insnmouth qui périclitait, Marsh les invoqua grâce à une amulette
qu’ils lui avaient confié. Les sacrifices humains reprirent de plus belle,
moyennant en contrepartie or et poissons en abondance. Ils exigèrent aussi de s’accoupler
aux humains, créant une nouvelle génération qui, comme eux, retrouverait un
jour les profondeurs marines et deviendrait immortelle. Enfin, ils établirent
leur propre cule à leur divinité, Dagon. Il s’ensuivra une révolte des
habitants de la ville, faisant de nombreux morts, et classée par les autorités
sous le terme « épidémie ».
Le voyageur retourne à
la Pension Gilman prendre sa valise pour rentrer en bus à Arkham. Mais le bus
tombe en panne, incident qui l’oblige à passer la nuit dans cet hôtel décrépi.
Une nuit atroce, face à l’agression nocturne de créatures repoussantes. Il sera
contraint à s’enfuir par les toits et à quitter Innsmouth à pied, poursuivi par
des hordes poissonneuses, jusqu’à la petite cité de Rowley où il ira dénoncer à
la police les horreurs qu’il a constatées.
Au cours de l'hiver 1927-1928, des
fonctionnaires du gouvernement fédéral menèrent une enquête mystérieuse et
confidentielle à propos de certains faits survenus dans l'ancien port de pêche
d'Innsmouth, Massachusetts. Le public ne l'apprit qu'en février, à l'occasion
d'une importante série de rafles et d'arrestations, suivie de l'incendie
volontaire et du dynamitage - avec les précautions qui s'imposaient - d'un
nombre considérable de maisons délabrées, vermoulues et qu'on supposait vides,
le long du front de mer abandonné. Les esprits peu curieux considérèrent cet
événement comme l'un des affrontements les plus graves de la guerre
intermittente contre les trafiquants d'alcool.
Rentré dans sa
famille, il apprend incidemment qu’il a des liens avec la famille Marsh. Il a
du reste un cousin à Canton qu’il a fallu aliéner. Son grand père lui montre même
dans ses archives une tiare selon un modèle qu’il n’a pas oublié. Et commence
alors un lent processus de transformation physique. Je vais tout préparer pour que mon cousin s’échappe de cet asile de
Canton, et nous irons ensemble à Innsmouth dans l’ombre des prodiges. Nous
nagerons jusqu’à ce récif qui médite dans la mer, nous plongerons à travers de
noirs abîmes jusqu’à la cyclopéenne Y’ha-nthlei aux mille colonnes, dans ce
repaire de Ceux des Profondeurs, et nous y vivrons à jamais dans
l’émerveillement et la gloire.
Au total, une
novellette particulièrement riche, qui reprend Dagon, introduit les Profonds et
fait quelques allusions aux shoggoths.
° (wiki) Les shoggoths figurent parmi les nombreuses créatures
indescriptibles des histoires de Lovecraft. Ils seraient des sortes d’amas
gélatineux munis de multiples yeux et de gueules aux dents acérées. Ils peuvent
changer de forme et prendre des proportions phénoménales.
Ils auraient été créés par les « Anciens »
pour être de parfaits esclaves1 . Au début
de leur histoire, les Anciens se servaient des shoggoths pour bâtir leurs cités
cyclopéennes et n'avaient aucun problème à les maîtriser. Ces shoggoths
obéissaient grâce à une sorte d'hypnose et vivaient uniquement sous la mer.
Avec le temps, ils s'habituèrent à la vie terrestre et gagnèrent en
indépendance grâce à un cerveau permanent. Puis, vint le jour où, suffisamment
indépendants et se rendant compte de leur propre puissance, les shoggoths se
rebellèrent contre leurs maîtres. Mais cette rébellion fut facilement maîtrisée
grâce à la technologie avancée des Anciens. Ceux-ci reprirent le contrôle de
leurs esclaves en intégrant une phase de domptage après la création des
nouveaux shoggoths.
° (wiki) Innsmouth est une ville imaginaire du Comté
d'Essex, Massachusetts,
créée par H. P. Lovecraft et mentionnée dans plusieurs de ses nouvelles, dont
la première est Cephalaïs en 1920. C'est une ville côtière
qui a connu son heure de gloire au XIXe siècle
et dont l'économie a périclité au début du XXe siècle.
Cette ville fictive se situe aux environs de plusieurs villes existantes :
Ipswich, Rowley, Newburyport (localisation approximative).
Innsmouth fut fondée en 1640 à l'embouchure de la rivière Manuxet, principalement destinée à être
un chantier naval, puis devient une ville industrielle mineure.
La concentration en poissons dans
ses eaux est tout à fait surnaturelle. La plupart de ses habitants sont
affligés d'anomalies physiques qui les rendent infréquentables par les
habitants des environs. Les cas les moins graves présentent des yeux bleus
globuleux qui ne se ferment jamais, un menton fuyant, une peau grisâtre et très
fine et des pieds démesurés. Les cas les plus graves sont enfermés dans les
maisons des quartiers abandonnés de la ville, dans lesquelles on ne voit jamais
de lumière mais où l'on entend quantité de bruits effrayants.
Il se trouve que la majorité des habitants d'Innsmouth
sont issus du croisement d'humains normaux avec une race d'hommes-poissons
vivant dans les profondeurs et sectateurs de Cthulhu. Les
habitants de la ville, eux, rendent un culte à Dagon. Plus la quantité de croisements est grande parmi ses
ascendants, plus l'individu présente des difformités importantes qui lui
permettent de rejoindre ses frères des profondeurs avec lesquels il peut vivre
éternellement.
°
BD
Avec
Une nuit à Innsmouth (Editions du Cygne, 1983), Terrier
signe une fort sympathique BD. Sympathique, car réalisée en noir et blanc, ce
qui cadre parfaitement avec l’atmosphère terrifiante du récit. Sympathique
surtout, parce qu’elle est très fidèle au texte de Lovecraft. A une exception
près, il est vrai. A la fin du récit, le narrateur ne rejoint pas les Profonds,
mais se réveille d’un mauvais rêve. C’est Lovecraft himself, ravi d’avoir
trouvé une matière première de qualité pour une prochaine nouvelle !
°
Pastiches
L’ouvrage de Edward Lee, L’abomination d’Innswich (Mythologica,
2014), est-il à mettre au-dessus du panier. Car il s’agit plus d’une enquête
lovecraftienne que d’un pastiche, la suggestion ampoulée faisant place au gore
le plus cru et le puritanisme pudibond à l’érotisme le plus torride. Nous
sommes sur les Terres du Maitre, juste après la mort de ce dernier, et Foster
Morley, un jeune fan oisif et fortuné, entreprend de visiter les principaux
sites arpentés par l’écrivain pour en éprouver l’ambiance. Après New York, il
se rend en direction de Salem et fait une halte dans une petite bourgade du nom
de Olmstead (personnage de Lovecraft dans Le
Cauchemar d’Innsmouth). Une cité côtière sans grand intérêt car récemment
reconstruite, mais un endroit pour le moins curieux : toutes les femmes
sont jeunes et jolies, et enceintes jusqu’au cou. Notre voyageur sympathise avec
l’une d’entre elles, Mary, serveuse, et, avec son aide, se met en recherche des
traces qu’aurait pu laisser Lovecraft lors de ses visites ainsi que des
éléments qui auraient pu l’inspirer dans son élaboration du mystère
d’Innsmouth. Et ce qu’il va découvrir dépasse l’entendement : les Profonds
sont bien là et ont noué une alliance avec les hommes qui les approvisionnent
en bébés en contrepartie de quoi ils sont assurés de toujours remplir
abondamment leurs filets de pêche. Je m’arrête là, car la chute, tout comme du
reste l’identité des géniteurs, sont aussi inattendus que grandioses…
Un bon récit, enveloppé sous une
couverture on ne peut plus kitsch ; une lecture hélas souvent perturbée
par les nombreuses coquilles qui polluent le texte : la maison de Lovecraft
de Benedict Street au lieu de Benefit, Howard Philip au lieu de Howard Phillips
etc…
° JDR : L’évasion d’Innsmouth, Chaosium 1994 (d’après Le Guide du Rôliste Galactique)
Ce
quatrième et dernier guide de la collection du Pays de Lovecraft est consacré à
la ville d'Innsmouth. On y apprend tout sur la dégénérescence de ses habitants
et l'étendue de leur corruption quelques semaines avant le raid du gouvernement
fédéral. Il se compose de deux parties : la description de la ville et de ses
habitants, puis deux scénarios.
Innsmouth
la mystérieuse commence le
supplément avec le récit de l'histoire (6 pages), officielle et officieuse, du
petit port, de sa prospérité passée à son déclin actuel. Il est suivi de Bienvenue
à Innsmouth (2 pages) qui décrit quelques généralités sur la cité :
services publics, accès, climat... Enfin Le cauchemar d'Innsmouth
conclut les généralités avec 8 pages de présentation du mal qui plane sur la
ville, ses conséquences, ses objectifs et ses moyens.
Le Guide d'Innsmouth et de ses environs décrit ensuite la ville et ses habitants (humains ou pas), portraits et plans à l'appui, y compris ce qui se cache au large du Récif du Diable. Le tout occupe 40 pages.
Le Guide d'Innsmouth et de ses environs décrit ensuite la ville et ses habitants (humains ou pas), portraits et plans à l'appui, y compris ce qui se cache au large du Récif du Diable. Le tout occupe 40 pages.
L'évasion
d'Innsmouth est le premier des deux
scénarios : les investigateurs doivent porter secours à un jeune homme en bien
mauvaise posture dans la cité maudite. Ce sera l'occasion d'en découvrir
quelques secrets.
Le second scénario est plus inattendu. Il s'agit de Le raid sur Innsmouth, qui occupe une cinquantaine de pages. Prévu pour être joué en partie avec des personnages pré-tirés, il propose aux joueurs de prendre part au raid gouvernemental sur Innsmouth, en qualité de "conseillers". Ce sera l'occasion d'assister à quelques scènes inhabituelles à L'Appel de Cthulhu, incluant en particluier un sous-marin de guerre.
Le second scénario est plus inattendu. Il s'agit de Le raid sur Innsmouth, qui occupe une cinquantaine de pages. Prévu pour être joué en partie avec des personnages pré-tirés, il propose aux joueurs de prendre part au raid gouvernemental sur Innsmouth, en qualité de "conseillers". Ce sera l'occasion d'assister à quelques scènes inhabituelles à L'Appel de Cthulhu, incluant en particluier un sous-marin de guerre.
Le
supplément s'achève sur Germes d'horreur pour des aventures à Innsmouth,
un court article (5 pages) proposant des idées de scénario et de campagne
touchant à Innsmouth, avant et après le raid. Une carte pliante (A3 noir et
blanc) d'Innsmouth est également fournie en fin d'ouvrage.
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