kamel mennour
47 rue saint andré des arts paris 75006 france tel+33156240363 fax+33140468020
kamelmennour.com
HUANG YONG PING
BUGARACH
5 décembre 2012 – 26 janvier 2013
5 décembre 2012 – 26 janvier 2013
Huang Yong Ping « Bugarach » est présentée à la
galerie kamel mennour du mardi au samedi, de 11 h à 19 h.
Pour toute information complémentaire, vous pouvez contacter Marie-Sophie Eiché, Jessy Mansuy-Leydier et Emma-Charlotte Gobry-Laurencin par tél : +33 1 56 24 03 63 ou par email : galerie@kamelmennour.com.
Pour toute information complémentaire, vous pouvez contacter Marie-Sophie Eiché, Jessy Mansuy-Leydier et Emma-Charlotte Gobry-Laurencin par tél : +33 1 56 24 03 63 ou par email : galerie@kamelmennour.com.
Kamel Mennour est heureux de présenter la seconde exposition personnelle
de l’artiste chinois Huang Yong Ping à la galerie.
Bugarach est le nom d’un village des Pyrénées françaises et du pic montagneux qui le surplombe, nommé « la montagne renversée » en raison de sa particularité géologique qui en fait une curiosité naturelle : ses couches inférieures sont plus récentes que ses couches supérieures. Hameau d’à peine 200 habitants, Bugarach est depuis les années 1970 un lieu de pèlerinage pour de nombreux adeptes d’ésotérisme New Age. Ce site est récemment devenu une destination très prisée en raison de la croyance selon laquelle le pic serait le seul lieu épargné lors de la « fin du monde » qui, selon certaines lectures du calendrier Maya, devrait advenir le 21 décembre 2012. Cette prophétie de l’apocalypse, ou plutôt les nombreuses théories de « grande transformation » ou de fin de cycle, avancées par les théoriciens ésotériques ou de fringe science (« science marginale ») est largement réfutée par les mayanistes. Elle se concrétise pourtant par l’afflux régulier de nouveaux habitants, pèlerins ou simples curieux venus du monde entier. Le pech de Bugarach est ainsi affublé de divers pouvoirs extraordinaires. Notamment considéré comme un haut lieu de présence extra-terrestre, il possèderait une cavité centrale, refuge des ovnis ou bien matrice d’un champ électromagnétique surnaturel qui empêcherait les avions de le survoler. Les différentes pratiques mystiques constatées récemment à Bugarach laissent entrevoir des syncrétismes de sagesses et de rituels orientaux, précolombiens ou amérindiens mâtinés de théories du complot. Les médias internationaux se pressent aujourd’hui à Bugarach en quête d’images folkloriques, et se font bruyamment l’écho de menaces de dérives sectaires, quitte à les alimenter en retour.
Dans notre société globalisée où la perte du sentiment religieux est contemporaine de l’essor de nouveaux extrémismes, la résurgence de ces spiritualités New Age à l’approche d’un cataclysme fantasmé n’est pas anodine. Il n’est pas étonnant que Huang Yong Ping s’empare de ce phénomène, lui qui depuis plusieurs années pointe avec justesse, dans ses installations monumentales, le rôle ambivalent de toute religion (Les Mains de Bouddha, 2006 ; Construction Site, 2007 ; Caverne 2009, 2009). La présente exposition est conçue en écho à une autre installation, Cirque, présentée simultanément à la galerie Barbara Gladstone à New York. Reliées dans le temps, elles sont également proches par leur thème : la fin des temps, ou plus précisément le temps de la fin.
En entrant dans la galerie, l’on est d’abord saisi par le vide de la première salle. Au plafond se trouve un dispositif d’alarme, objet préventif mais aussi menaçant, dont on craint qu’il se déclenche inopinément. C’est en accédant à la deuxième salle que l’on découvre de nombreux corps d’animaux de toutes espèces, seize en tout, qui ont la double particularité d’être entièrement blancs, et privés de leurs têtes. Dispersés, marchant dans toutes les directions, leur désorientation est manifeste.
La plus petite salle est, par un étrange effet de déséquilibre, au contraire de la première, envahie par une énorme masse de neuf mètres de longueur, semblable à un grand rocher qui aurait brutalement émergé de terre. En contournant cette réplique en « miniature » du pic de Bugarach, on découvre une grande assiette blanche de quatre mètres de diamètre qui semble s’être fichée dans, ou bien émerger de la montagne. A moitié enfoncée dans la roche, elle est inclinée, et l’on y retrouve les têtes des seize animaux errants, toutes dressées vers le ciel. Ces yeux écarquillés, ces gueules ouvertes semblent contempler, défier ou peut-être supplier un hélicoptère en survol, placé juste au-dessus d’elles. Ce dernier chercherait-il à se poser, qu’il ne le pourrait point, la totalité du paysage étant abrupt et instable. Un drame cruel se joue dans ce face-à-face sans issue entre les animaux qui cherchent le salut et cet hélicoptère, dont on ne sait s’il représente pour eux une menace ou un espoir.
Bugarach est le nom d’un village des Pyrénées françaises et du pic montagneux qui le surplombe, nommé « la montagne renversée » en raison de sa particularité géologique qui en fait une curiosité naturelle : ses couches inférieures sont plus récentes que ses couches supérieures. Hameau d’à peine 200 habitants, Bugarach est depuis les années 1970 un lieu de pèlerinage pour de nombreux adeptes d’ésotérisme New Age. Ce site est récemment devenu une destination très prisée en raison de la croyance selon laquelle le pic serait le seul lieu épargné lors de la « fin du monde » qui, selon certaines lectures du calendrier Maya, devrait advenir le 21 décembre 2012. Cette prophétie de l’apocalypse, ou plutôt les nombreuses théories de « grande transformation » ou de fin de cycle, avancées par les théoriciens ésotériques ou de fringe science (« science marginale ») est largement réfutée par les mayanistes. Elle se concrétise pourtant par l’afflux régulier de nouveaux habitants, pèlerins ou simples curieux venus du monde entier. Le pech de Bugarach est ainsi affublé de divers pouvoirs extraordinaires. Notamment considéré comme un haut lieu de présence extra-terrestre, il possèderait une cavité centrale, refuge des ovnis ou bien matrice d’un champ électromagnétique surnaturel qui empêcherait les avions de le survoler. Les différentes pratiques mystiques constatées récemment à Bugarach laissent entrevoir des syncrétismes de sagesses et de rituels orientaux, précolombiens ou amérindiens mâtinés de théories du complot. Les médias internationaux se pressent aujourd’hui à Bugarach en quête d’images folkloriques, et se font bruyamment l’écho de menaces de dérives sectaires, quitte à les alimenter en retour.
Dans notre société globalisée où la perte du sentiment religieux est contemporaine de l’essor de nouveaux extrémismes, la résurgence de ces spiritualités New Age à l’approche d’un cataclysme fantasmé n’est pas anodine. Il n’est pas étonnant que Huang Yong Ping s’empare de ce phénomène, lui qui depuis plusieurs années pointe avec justesse, dans ses installations monumentales, le rôle ambivalent de toute religion (Les Mains de Bouddha, 2006 ; Construction Site, 2007 ; Caverne 2009, 2009). La présente exposition est conçue en écho à une autre installation, Cirque, présentée simultanément à la galerie Barbara Gladstone à New York. Reliées dans le temps, elles sont également proches par leur thème : la fin des temps, ou plus précisément le temps de la fin.
En entrant dans la galerie, l’on est d’abord saisi par le vide de la première salle. Au plafond se trouve un dispositif d’alarme, objet préventif mais aussi menaçant, dont on craint qu’il se déclenche inopinément. C’est en accédant à la deuxième salle que l’on découvre de nombreux corps d’animaux de toutes espèces, seize en tout, qui ont la double particularité d’être entièrement blancs, et privés de leurs têtes. Dispersés, marchant dans toutes les directions, leur désorientation est manifeste.
La plus petite salle est, par un étrange effet de déséquilibre, au contraire de la première, envahie par une énorme masse de neuf mètres de longueur, semblable à un grand rocher qui aurait brutalement émergé de terre. En contournant cette réplique en « miniature » du pic de Bugarach, on découvre une grande assiette blanche de quatre mètres de diamètre qui semble s’être fichée dans, ou bien émerger de la montagne. A moitié enfoncée dans la roche, elle est inclinée, et l’on y retrouve les têtes des seize animaux errants, toutes dressées vers le ciel. Ces yeux écarquillés, ces gueules ouvertes semblent contempler, défier ou peut-être supplier un hélicoptère en survol, placé juste au-dessus d’elles. Ce dernier chercherait-il à se poser, qu’il ne le pourrait point, la totalité du paysage étant abrupt et instable. Un drame cruel se joue dans ce face-à-face sans issue entre les animaux qui cherchent le salut et cet hélicoptère, dont on ne sait s’il représente pour eux une menace ou un espoir.
La robe blanche des animaux rappelle la couleur souvent choisie par les
groupes religieux ou sectaires pour leurs habits de culte ; c’est la couleur de la
pureté et de l’endoctrinement. L’hélicoptère est un engin symbolique de la
surveillance et du contrôle, corollaires du besoin de protection à l’œuvre
dans toute société. Il rappelle aussi l’avion espion américain qui fut le sujet du
Projet chauve-souris (2000-2005), que Huang Yong Ping comparait à une 1
grande coquille vide , dénonçant ainsi le caractère illusoire de tout dispositif de contrôle.
Ainsi l’ensemble de l’exposition esquisse une scène de chaos, où sont constamment déjoués les repères d’échelle, et où sont bouleversés les rapports de forces entre le naturel et l’artificiel, le sauvage et le social. Ici ce n’est pas la montagne qui est renversée, mais bien plutôt le socle sur lequel reposent, impuissantes, les créatures terrestres. Cette « soucoupe volante » prise au piège, figée dans son instabilité, nous invite à percevoir cette scène comme l’apogée du drame, l’instant paroxystique du basculement.
De manière récurrente dans l’œuvre de Huang Yong Ping, les animaux jouent un rôle métaphorique pour les comportements humains. Ici les animaux sans tête ont sans doute le même rôle que les insectes vivants de Théâtre du monde (1993), à savoir de jouer le dernier acte d’une comédie de la cruauté dont nous sommes à la fois les sujets et les spectateurs.
Dans Arche 2009 (2009), les animaux taxidermisés se trouvaient au cœur d’un dispositif où la notion de protection est seulement illusoire, comme l’explique l’artiste dans le catalogue édité à cette occasion : « dès que
1 survient une crise, nous avons toujours l’illusion qu’il existe une « arche » (...) » ,
c’est à dire un lieu de refuge intact, alors même que le danger vient précisément du cœur de la société, de sa part irréductible de chaos. Ainsi Huang Yong Ping, lors de ses recherches pour la présente exposition, notait-il logiquement : « Bug-arach / Bug-arche ».
Si les théories de « la fin des temps » et la croyance en un refuge à Bugarach peuvent sembler anecdotiques ou risibles, Huang Yong Ping nous rappelle ici que la réalité n’est pourtant pas stable. En érigeant ce fait d’actualité au rang de monument, il réduit les différences de temporalité inhérentes à l’événement politique et à l’œuvre d’art, et suggère ainsi que l’un et l’autre ne sont jamais très éloignés. En conférant une portée symbolique plus large à cette affaire, symptomatique d’une perte de sens généralisée, il semble nous indiquer que le monde tel que nous le connaissons est plus que jamais incertain, et que la déroute est bien réelle, tant au plan social qu’environnemental. Le mythe de la « fin du monde » résonne alors ici comme le symptôme, la partie émergée d’une entreprise destructrice dont on ne saurait déceler la cause ni le remède, du moins tant que resteront séparés le corps et la tête.
--
1. Huang Yong Ping, notes sur le Bat Project, dans House of Oracles: A Huang Yong Ping Retrospective, Walker Art Center, Minneapolis, 2005 encart pp. 60-79.
2. Huang Yong Ping, “Arche perdue”, interview par Richard Leydier, dans Huang Yong Ping, Myths, éd. Kamel Mennour, Paris, 2009, p.38
Né en 1954 à Xiamen (Chine), Huang Yong Ping vit et travaille à Paris depuis 1989.
Huang Yong Ping a participé à l'exposition "Magiciens de la Terre" au Centre Pompidou à Paris en 1989, et a représenté la France à la Biennale de Venise en 1999. En 2006, le Walker Art Center de Minneapolis lui consacre sa première rétrospective "House of Oracles," qui est devenue une exposition itinérante au Mass MoCA à North Adams (Massachusetts), à la Vancouver Art Gallery, et au Ullens Center à Pékin. Son travail a également fait l'objet de nombreuses autres expositions personnelles : au CCA Kitaky sh , au Japon ; à De Appel à Amsterdam ; à la Fondation Cartier pour l'Art Contemporain à Paris ; au Astrup Fearnley Museum à Oslo ; à la Barbican Art Gallery à Londres ; au New Museum of Contemporary Art à New York ; à la Chapelle des Petits-Augustins des Beaux-Arts de Paris ; au Musée Océanographique de Monaco, ainsi qu’à Nottingham Contemporary à Nottingham.
Dans le cadre de la manifestation lille3000, le musée de l’Hospice Comtesse lui consacre une exposition personnelle jusqu’au 13 janvier prochain ; de même que le MAC – Musée d’art contemporain de Lyon du 15 février au 14 avril 2013.
Projet chauve-souris (2000-2005), que Huang Yong Ping comparait à une 1
grande coquille vide , dénonçant ainsi le caractère illusoire de tout dispositif de contrôle.
Ainsi l’ensemble de l’exposition esquisse une scène de chaos, où sont constamment déjoués les repères d’échelle, et où sont bouleversés les rapports de forces entre le naturel et l’artificiel, le sauvage et le social. Ici ce n’est pas la montagne qui est renversée, mais bien plutôt le socle sur lequel reposent, impuissantes, les créatures terrestres. Cette « soucoupe volante » prise au piège, figée dans son instabilité, nous invite à percevoir cette scène comme l’apogée du drame, l’instant paroxystique du basculement.
De manière récurrente dans l’œuvre de Huang Yong Ping, les animaux jouent un rôle métaphorique pour les comportements humains. Ici les animaux sans tête ont sans doute le même rôle que les insectes vivants de Théâtre du monde (1993), à savoir de jouer le dernier acte d’une comédie de la cruauté dont nous sommes à la fois les sujets et les spectateurs.
Dans Arche 2009 (2009), les animaux taxidermisés se trouvaient au cœur d’un dispositif où la notion de protection est seulement illusoire, comme l’explique l’artiste dans le catalogue édité à cette occasion : « dès que
1 survient une crise, nous avons toujours l’illusion qu’il existe une « arche » (...) » ,
c’est à dire un lieu de refuge intact, alors même que le danger vient précisément du cœur de la société, de sa part irréductible de chaos. Ainsi Huang Yong Ping, lors de ses recherches pour la présente exposition, notait-il logiquement : « Bug-arach / Bug-arche ».
Si les théories de « la fin des temps » et la croyance en un refuge à Bugarach peuvent sembler anecdotiques ou risibles, Huang Yong Ping nous rappelle ici que la réalité n’est pourtant pas stable. En érigeant ce fait d’actualité au rang de monument, il réduit les différences de temporalité inhérentes à l’événement politique et à l’œuvre d’art, et suggère ainsi que l’un et l’autre ne sont jamais très éloignés. En conférant une portée symbolique plus large à cette affaire, symptomatique d’une perte de sens généralisée, il semble nous indiquer que le monde tel que nous le connaissons est plus que jamais incertain, et que la déroute est bien réelle, tant au plan social qu’environnemental. Le mythe de la « fin du monde » résonne alors ici comme le symptôme, la partie émergée d’une entreprise destructrice dont on ne saurait déceler la cause ni le remède, du moins tant que resteront séparés le corps et la tête.
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1. Huang Yong Ping, notes sur le Bat Project, dans House of Oracles: A Huang Yong Ping Retrospective, Walker Art Center, Minneapolis, 2005 encart pp. 60-79.
2. Huang Yong Ping, “Arche perdue”, interview par Richard Leydier, dans Huang Yong Ping, Myths, éd. Kamel Mennour, Paris, 2009, p.38
Né en 1954 à Xiamen (Chine), Huang Yong Ping vit et travaille à Paris depuis 1989.
Huang Yong Ping a participé à l'exposition "Magiciens de la Terre" au Centre Pompidou à Paris en 1989, et a représenté la France à la Biennale de Venise en 1999. En 2006, le Walker Art Center de Minneapolis lui consacre sa première rétrospective "House of Oracles," qui est devenue une exposition itinérante au Mass MoCA à North Adams (Massachusetts), à la Vancouver Art Gallery, et au Ullens Center à Pékin. Son travail a également fait l'objet de nombreuses autres expositions personnelles : au CCA Kitaky sh , au Japon ; à De Appel à Amsterdam ; à la Fondation Cartier pour l'Art Contemporain à Paris ; au Astrup Fearnley Museum à Oslo ; à la Barbican Art Gallery à Londres ; au New Museum of Contemporary Art à New York ; à la Chapelle des Petits-Augustins des Beaux-Arts de Paris ; au Musée Océanographique de Monaco, ainsi qu’à Nottingham Contemporary à Nottingham.
Dans le cadre de la manifestation lille3000, le musée de l’Hospice Comtesse lui consacre une exposition personnelle jusqu’au 13 janvier prochain ; de même que le MAC – Musée d’art contemporain de Lyon du 15 février au 14 avril 2013.
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