Dos Santos, dans Le Manuscrit de Birkenau, poursuit l’histoire de Levin le magicien et de Francisco Latino, tête brulée portugaise entré dans la SS pour essayer de sauver sa fiancée Tanusha internée à Auschwitz. La description de la vie quotidienne dans le camp est toujours aussi insoutenable, d’autant que l’auteur s’est appuyé sur les lettres et journaux rédigés par les détenus et planqués sous les lattes du plancher des baraquements. Des témoignages poignants, afin que nul n’oublie. J’ai retenu deux passages étonnants dans cet ouvrage
Le premier rend compte du malaise de certains SS obligés de tuer des femmes et des enfants et comprenant mal de quel crime ces prisonniers s’étaient rendus coupables. Une protestation lourdement silencieuse, d’autant que certains avaient plaisir à aller voir jouer et chanter les gamins à la petite école de Hirsh (cf La Bibliothécaire d’Auschwitz, 2021). Cela vaudra une énergique reprise en main des hésitants par l’un des grands chefs du camp : Höss. Il leur administrera un discours très structuré, quasi universitaire, sur la nécessité de protéger la race aryenne et de préparer l’avènement des seigneurs.
L’autre analyse marquante est celle concernant l’ésotérisme, sur lequel Dos Santos insiste avec conviction dans sa postface. Les délires ésotériques sont selon lui une des clefs de compréhension de la Shoah. On voit d’abord un SS rédiger une lettre à l’intention des autorités brésiliennes, pour leur demander de remettre au Reich un crâne de cristal exposé dans un musée de la capitale. Car cet artefact pourra rendre invincible le Reich. On y apprend aussi que pour localiser l’endroit où Mussolini a été fait prisonnier, les responsables nazis avaient fait appel à toute une équipe d’astrologues et de radiesthésistes On y admire encore Nivelli en train de donner un spectacle de magie aux autorités SS et leur délivrer un message éloquent : il a fait ses classes dans un monastère au Tibet où il a eu l’occasion de découvrir les grands mystères de l’univers. Ce dernier a été créé par le choc de blocs de glace (on retrouve les théories d’Horbiger) qui ont donné naissance à la terre. Suite à divers cataclysmes, Thulé a laissé place à l’Atlantide qui s’est disloquée. Les populations aryennes d’origine se sont retrouvées, pour leur majeure partie au Nord de l’Europe, pour les autres en Asie et notamment en Inde. On croirait lire du Willigut !
Le roman se terminera sur la révolte manquée du camp de concentration et une débandade généralisée suite à l’approche des troupes russes. Les SS, sur l’ordre d’Himmler, détruiront avec frénésie les fours crématoires, afin de ne pas laisser trace de leurs crimes. Le dernier chapitre prendra la forme du vrai-faux journal du magicien dans lequel il raconte comment il a été obligé de conduire sa femme et son fils à l’abattoir. Atroce.
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