mardi 29 décembre 2020

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : 1984, Orwel & Nesti

 


 

 

C’est toujours agréable de réviser ses classiques et la publication sous forme de BD de 1984 de George Orwell (adaptation de Fido Nesti, Grasset 2020) nous en donne le prétexte[1]. D’autant que ce roman résonne curieusement avec une actualité récente, rythmée par la pandémie et le terrorisme aveugle. L’air est empesté par les effluves de la conspiration et de la collapsologie sur fond d’apocalypse rampante. George Orwell a écrit ce bouquin en 1948 et imagine la Grande-Bretagne, trente ans après une guerre nucléaire entre l'Est et l'Ouest censée avoir eu lieu dans les années 1950, et où s'est instauré un régime de type totalitaire fortement inspiré à la fois du stalinisme et de certains éléments du nazisme. La liberté d'expression n’existe plus. Toutes les pensées sont minutieusement surveillées, et d’immenses affiches sont placardées dans les rues, indiquant à tous que « Big Brother vous regarde » (Big Brother is watching you). Le livre de Nesti est élégant, fort de 224 pages, et très fidèle à l’original. On y trouve du reste, sous une typographie à l’ancienne, de larges extraits du Livre de Cassandre qui circule sous le manteau et qui décrit la transition entre les deux mondes et les caractéristiques essentielles de l’Ordre Nouveau. La planète est divisée en trois blocs, l’Océania (Amériques, îles de l'Atlantique, comprenant notamment les îles Anglo-Celtes, Océanie et Afrique australe), l’Eurasia (reste de l'Europe et URSS) et l’Estasia (Chine et ses contrées méridionales, îles du Japon, et une portion importante mais variable de la Mongolie, de la Mandchourie, de l'Inde et du Tibet) qui sont en guerre perpétuelle les uns contre les autres. Une guerre totale et ridiculement inutile, car les forces en présence sont équivalentes et nul ne pourra jamais prendre le contrôle des autres.

Nous découvrons le nouveau Londres (en Océania) en compagnie de Winston Smith, anti-héros par excellence dans le costume d’un obscur employé dans l’un des quatre ministères qui emploient la population[2]. Il possède un poste stratégique, œuvrant dans les équipes chargées en permanence de réécrire l’histoire en fonction de l’évolution de la pensée du parti. Il vit dans un petit appartement où trône un grand téléviseur, chargé de déverser en permanence la « bonne parole », mais aussi d’observer ce qui se passe chez les gens. Il a réussi à installer une petite table derrière l’appareil où il peut s’isoler pour écrire sans être vu, torturé par des bouffées d’incompréhension quant à la logique du système. Comme tous les citoyens, il se doit de participer régulièrement à la « minute de la haine », pour vilipender le « Traître Emmanuel Goldstein » supposé être à la source de tous les maux de la société. C’est à l’occasion de ces manifestations qu’il rencontre Julia avec laquelle il vivra une relation passionnée, dans des appartements glauques ou dans les ruines d’une abbaye. Winston sera contacté par un certain O’Brien, à la tête de la Fraternité, mouvement de résistance supposé être conduit par Goldstein. Il lui remettra une copie du Livre de Cassandre, tout en attirant l’attention du couple sur leur peu de chances d’échapper à la Police de la Pensée. Et de fait, les deux amants finiront par être arrêtés et torturés, O’Brien jouant évidemment double jeu. Les scènes de lavage de cerveau de notre pauvre rebelle sont à la limite du soutenable, et son petit stage dans la chambre dite 101 l’amènera à capituler et à faire amende, reconnaissant ses erreurs grossières. Il obtiendra sa libération, mais une libération en trompe œil. Winston Smith terminera en effet rapidement sa carrière terrestre par une balle tirée par derrière qui lui fracassera le crâne. Quant à Jane, elle se fondra dans l’oubli éternel.

 

Cette version BD, comme le roman original, se conclut sur un excellent dossier annexe donnant les principes de base de la Novlangue (ou Néoparler). Un dossier très fouillé, véritable traité de linguistique imaginaire, qui montre comment on peut utiliser le langage pour restreindre, voire supprimer, toute liberté de penser. C’est tout simplement effrayant !

 

La manipulation du langage à des fins de propagande est un vaste sujet et nos politiques n’ont pas fait mieux, du reste, sur la période récente, en tronquant certains propos de Orwell pour condamner la gestion du gouvernement dans la gestion de la crise sanitaire de 2020. Le journaliste Marius Dupont-Besnard note[3] sur son blog Numerama (octobre 2020) :

Il y a quelque chose d’absurde, mais aussi de malsain, à voir 1984 être utilisé dans le contexte actuel. Le régime décrit par Orwell était une dénonciation des régimes totalitaires qui ont terrorisé l’humanité au XXe siècle. Évidemment, comme souvent en littérature d’anticipation, il est tout à fait possible d’en extraire des propos pertinents pour l’appliquer aux évolutions — et dérives — de notre société (nous parlions récemment dans Numerama de la pertinence de 1984 à notre époque). Mais une application à ce contexte de pandémie est une grave erreur, à plusieurs égards.

Dans un régime totalitaire, l’État de droit est inexistant. Les régimes nazis et staliniens réfutaient le principe juridique même, ayant tous deux entrepris de réduire le cadre légal comme peau de chagrin afin de soumettre le pays au principe de l’arbitraire. Inversement, dans un État de droit comme la France actuelle, même les restrictions de liberté sont elles-mêmes encadrées par la loi. Le couvre-feu ne pouvait être déclenché qu’à partir du moment où l’état d’urgence était le cadre légal déclaré. Et l’état d’urgence, qui permet de déroger à la liberté de circuler, est lui-même régi et limité juridiquement. À cet aspect légal, ajoutons la spécificité du contexte : une pandémie. Il s’agit d’un état d’urgence sanitaire face à la saturation croissante des hôpitaux en pleine deuxième vague.

Dans 1984, il n’y a aucun virus qui circule, ni État de droit. L’annihilation de la curiosité, de la joie de vivre à laquelle fait référence Orwell ; la prédominance des émotions de terreur ; l’interdiction de toute contestation et de toute diversité ; les restrictions liberticides sont le fruit d’un régime qui instaure une destruction automatisée et systématique de la pensée, de la dignité humaine et de la liberté. Cela ne s’applique pas à une pandémie, où les mesures sont là pour sauver des vies et soulager le personnel soignant.

 

Arrivé à ce stade de la réflexion sur le livre d’Orwell, on ne peut s’empêcher de se poser LA question toujours sous-jacente dès que l’on aborde le problème de la conspiration totalitaire : tout ça pourquoi ? Jean-Pierre Monteils, dans Les Magiciens du Crépuscule (Arqua, 2020), ouvre le débat du ça sert à quoi ? Et de nous proposer une typologie basique :

° un petit groupe de personnes qui cherchent à tirer un maximum de profit de l’exploitation de notre monde pour leur propre compte,

° ou à l’inverse des êtres parvenus à un tel niveau de spiritualité qu’ils souhaitent assurer le bonheur de leurs congénères,

° ou encore une assemblée cherchant à détruire notre monde de la façon la plus radicale possible (mais pourquoi ?)

° ou aussi des « envahisseurs » en quête de moyens de subsistance au profit de leur propre peuple en déshérence (extra – ou intra terrestres, mais aussi lémuriens, reptiliens…)

° enfin pour être complet, une vengeance de Satan visant à détruire les œuvres de Dieu.

Force est d’admettre que ça colle assez mal avec ce cher Big Brother. Il doit comme tout le monde aimer la tête de veau, avoir du cholestérol et mal supporter une femme acariâtre ! Alors ?



[1] George Orwell (Eric Arthur Blair de son vrai nom, 1903-1950) est entré également dans la prestigieuse collection « La Pléiade » en octobre 2020.

[2] Ces quatre ministères sont représentés comme quatre grands blocs qui « écrasaient complètement l'architecture environnante »22, démesurément hautes et identiques. Elles constituent principalement l'appareil gouvernemental.

·       Le Ministère de la Vérité (Miniver) : s'occupe de « l'information, de l'éducation, des divertissements et des beaux-arts »

·       Le Ministère de la Paix (Minipax) : s'occupe de la guerre

·       Le Ministère de l'Amour (Miniamour) : s'occupe du respect de la loi et de l'ordre

·       Le Ministère de l'Abondance (Miniplein) : est responsable des affaires économiques

[3] Concernant les fausses citations, c’est Nicolas Dupont-Aignan qui en remporte la palme. L’homme politique a partagé ceci sur Twitter [mise à jour : il a dorénavant supprimé son tweet, voir copie d’écran plus bas] : « En dehors du travail, tout sera interdit… Marcher dans les rues, se distraire, chanter, danser… ». Malgré nos recherches dans différentes traductions du livre, nous n’avons pas pu identifier cette citation. Sur Reddit, des utilisateurs signalent avoir vu cette citation apparaître pour la première fois en anglais : « Everything other than working was forbidden : walking in the streets, having fun, singing, dancing, getting together, everything was forbidden… ». Et là encore, nous n’avons pas pu trouver trace de cette phrase dans le manuscrit en version originale. Cela semble donc être tout bonnement la traduction d’une fausse citation.

 


samedi 26 décembre 2020

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LA BIBLIOTHÈQUE IMPOSSIBLE, Alister

 


 

Bel ouvrage que celui d’Alister, La Bibliothèque Impossible, Anthologie des livres bizarres, interdits ou imaginaires (la tengo, 2020). Si Dieu existait, il serait une bibliothèque écrivait Umberto Ecco. Et bien ce livre est une preuve de l’existence de Dieu, car il nous montre que le livre est tellement indispensable que lorsqu’on n’en a pas assez, on en invente. D’où un premier chapitre sur « le Livre Imaginaire » ou le Necronomicon côtoye le Mad Trist d’Edgar Poe (in La Chute de la Maison d’Usher) et le traité sur les cendres de différents tabacs de Sherlock Holmes. « Les Livres Interdits » nous rappellent qu’ils ont été aussi le véhicule du souffre comme Les Protocoles des Sages de Sion, Mein Kampf ou Tintin mon copain de Léon Degrelle. Dans les livres cadeaux, on trouvera l’indispensable Livre de recettes Tupperware. On glissera des « Livres à l’Index » aux « Livres Mystérieux », chapitre qui n’oublie pas de rendre hommage à Jacques Bergier. Quant à la « BiblioSex », elle ne pouvait pas passer sous silence De Gaulle et le sexe de Maurice Lemaître. J’arrête là cette énumération qui n’est qu’une mise en bouche, ce livre est un régal de surcroît superbement illustré.

 


samedi 19 décembre 2020

VERONIQUE CAMPION-VINCENT, UNE FAMILLE CINEMATOGRAPHIQUE

Paris, le 18 décembre

 

 

 

 

Chère famille

Bonjour à tous

 

Olga Vincent, ma fille, a écrit et produit un film intitulé La Fugue récit dramatique de la fugue d’une adolescente et de la quête de ses parents pour la retrouver, qui sera projeté sur France 2 le mercredi 6 janvier 2021 à 21:05. La projection sera suivie d’un débat sur le grave problème des figues d’adolescents tes.

Voici quelques liens d’information sur ce film, que je vous laisse découvrir

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Fugue_(t%C3%A9l%C3%A9film)

https://www.coulisses-tv.fr/index.php/fictions/item/15888-%E2%80%9Cla-fugue%E2%80%9D-soir%C3%A9e-continue-%C2%AB-ados-en-fugue-le-combat-des-parents-%C2%BB,-mercredi-6-janvier-sur-france-2

http://www.leblogtvnews.com/2020/12/ados-en-fugue-soiree-speciale-le-6-janvier-sur-france-2-telefilm-puis-debat.html

 

On compte sur vous pour doper l’audimat !

 

Ce n’est pas tout. Deux nouveaux épisodes de la comédie policière Le Crime lui va si bien (dont le premier épisode avait été projeté le 20 décembre 2019) seront projetés sur France 2 le vendredi 8 janvier à partir de 21:05. Pour les oublieux, le premier épisode sera projeté à nouveau  sur France 2 le samedi 2 janvier 2021, à 21:05 Cette comédie a été également également écrite par Olga  et produite par Ramona productions.

Joyeux Noël intime, et bonne année 2021, que nous souhaitons tous meilleure que la précédente.

Affections familiales

Véronique

 


lundi 14 décembre 2020

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : MOI, LOVECRAFT, Sougey-Fils & Malevil

 


Étrange livre que celui que nous proposent Yann Sougey-Fils (au pinceau) et Jean-Christophe Malevil (à la plume), Moi, Lovecraft aux Éditions des Tourments[1], 2019. L’objet est joliment réalisé et le récit se propose de nous transporter dans la tête de Lovecraft : et si je nous racontais qui j’étais vraiment, moi, Howard Phillips Lovecraft ? Et c’est ce qui est tenté, à grand renfort de citations (lettres et textes), en mettant l’accent de façon appuyée sur l’aspect sombre du personnage : enfance malheureuse, réclusion, échecs littéraires, mariage raté, le tout baignant dans une poisseuse indifférence cosmique dont se nourrissent au son des flûtes et des tambourins d’abominables créatures. Le tout est traité de façon succincte, comme les créations de l’auteur qui n’ont droit qu’à une brève citation (ex : 1920 ; en mars, Le Témoignage de Randolph Carter est publié dans the Vagrant) sans aucun développement. Quant au fait que Lovecraft ait été un grand voyageur, cela est évacué sous forme d’un listing des villes visitées (auquel il manque Québec) qui provient d’un travail de recherche de Denis Labbé in Les Voyages de Lovecraft[2].

Au total, un ouvrage qui aurait pu être intéressant, car basé sur une approche originale, mais qui manque de profondeur et peut-être aussi d’équilibre. Car comme l’indique avec humour S.T. Joshi à la fin de sa monumentale biographie, Lovecraft était aussi un joyeux farceur !

 

NB : on lira avec intérêt, parallèlement à ce texte, l’ouvrage de Jacky Ferjault, beaucoup plus consistant (Moi, Howard Phillips Lovecraft, EODS 2004)



[1] Je ne connaissais pas cet éditeur dont le catalogue vaut assurément le détour (voir sur internet).

[2] L’édition n’est pas citée, je suppose qu’il s’agit de la Revue Phénix.

dimanche 13 décembre 2020

SUPERSTITIONS EN TRANSYLVANIE, Emily Gerard

 


 

 

Le Castor Astral nous donne régulièrement des petites perles vampiriques, et ce bouquin en est une. Superstitions en Transylvanie (2018) est signé Emily Gerard, une autrice écossaise mariée à un cavalier hongrois stationné en Roumanie (Sibiu). Elle donne une première description détaillée du sujet dans son article « Transylvanian Superstitions » à la page 136 du magazine littéraire anglais The Nineteenth Century de . L'article fut par la suite reproduit et développé dans son ouvrage The Land Beyond the Forest, publié en 1888. Il est évident qu’il s’agit de l’une ses sources de Bram Stoker. Je cite Emily Gerard :

« Et tant que je suis sur le sujet des orages, je pourrais aussi mentionner ici la Scholomance, une école censée exister quelque part au cœur des montagnes où tous les secrets de la nature, le langage des animaux, et tous les sorts de magie et charmes imaginables sont enseignés par le diable en personne. Seuls dix étudiants sont admis à la fois ; et quand le cours de l'apprentissage a expiré et que neuf d'entre eux sont libres de rentrer chez eux, le dixième est détenu par le diable en guise de paiement, et monté sur un Ismeju (dragon), il devient désormais l'aide-de-camp du diable et l'assiste pour « faire le temps », c'est-à-dire pour préparer la foudre. Un petit lac, infiniment profond, situé très haut dans les montagnes au sud de Hermanstadt, est censé être le creuset où est brassée la foudre, et par beau temps le dragon dort sous les eaux. »

Une citation à mettre au regard de celle de Van Helsing :

« D’après ce que j’ai appris grâce aux recherches de mon ami Arminius de Budapest, il (Dracula) était de son vivant un homme remarquable, guerrier, homme d’État, alchimiste ; et l’alchimie représentait alors le plus haut degré de la science. Il avait une puissante intelligence, une culture sans égale, et un cœur qui ne connaissait ni peur ni remords. Il eut même l’audace d’assister aux leçons de Scholomance et ne laissa sans s’y essayer aucune branche du savoir de son époque. »

Précisons encore que la voyageuse décrit précisément le « canon » qui deviendra célèbre sous la plume de Bram Stoker : 

« … Toute personne tuée par un nosferatu devient elle-même vampire après sa mort et suce le sang des innocents tant que son esprit n’a pas été exorcisé ; pour cela, il faut ouvrir sa tombe et lui enfoncer un pieu dans le cœur, ou tirer au pistolet à travers le cercueil. Un autre moyen de contenir un vampire dans sa tombe est de marcher autour de celle-ci en fumant à chaque anniversaire du décès. Pour les cas de vampirisme persistant, il est recommandé soit de couper la tête et de la replacer dans le cercueil après avoir rempli la bouche d’ail, soit d’extraire le cœur et de le brûler, puis d’éparpiller les cendres sur la tombe. »

On rappellera enfin, pour être complet que, Vámbéry a transmis à Bram Stoker les Histoires de la Moldavie et de la Valachie de Johann Christian von Engel (publiées au début du XIXe siècle) pour le roman Dracula : Stoker le cite à travers son personnage, Abraham Van Helsing qui dit avoir été inspiré par my friend Arminius Vambery, of Buda-Pesth University.

 

Un excellent petit livre à mettre au regard de Où sont passés les vampires ? de Ionna Andreesco (Payot et Rivages, 1997, réédition en 2004), une véritable enquête ethnologique au cœur de la Transylvanie Profonde


 https://lebibliothecaire.blogspot.com/2010/04/de-lexistence-des-vampires.html

 


samedi 12 décembre 2020

REMI MOGENET A LU THE WATAN ORIGIN (Philippe Marlin)

Philippe Marlin et The Watan Origin

51PrO8JQswL._AC_SL1500_.jpgMon ami l'éditeur Philippe Marlin m'a donné un livre qu'il a écrit, intitulé The Watan Origin. La géopolitique au regard de la science, de l'ésotérisme et de la littérature (2016). Le titre fait allusion à une histoire racontée par René Guénon (1886-1951) et, avant lui, par Alexandre Saint-Yves d'Alveydre (1842-1909), selon laquelle il existerait un alphabet primordial, antérieur à celui des Égyptiens et des Juifs, et que certains mystérieux initiés connaîtraient. Philippe Marlin en a ensuite rêvé, et dans son rêve la chose était en anglais.

Dans cet ouvrage, l'auteur expose différentes merveilles des théories scientifiques actuellement à la mode, et les perspectives des nouvelles inventions – ou des devins modernes qui tentent de prédire l'avenir pour dire, souvent, que l'époque est horrible. Il y a des histoires plaisantes sur le pays cathare et ses mystères – et le plus beau est celui dont j'ai déjà parlé, et qu'a probablement créé Maurice Magre (1877-1941): le Graal serait dans la montagne de Montségur, et on raconte qu'un certain Otto Rahn (1904-1939), proche de Himmler, l'aurait cherché.

Il y a aussi les extraterrestres de Bugarach, comme de juste, et toute sorte de fantaisies inspirées par les Mitounes, ainsi que je l'ai dit ailleurs. (De mon point de vue, elles sont l'essence des mystères pyrénéens.)

Philippe Marlin présente à ses lecteurs la pensée de Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955), et comme je l'aime infiniment, j'en ai été heureux. Il en dit du bien, montrant que le divin jésuite a synthétisé le christianisme et la science la plus moderne, y compris la physique quantique, pour donner à la Création un dynamisme nouveau, tout en gardant le Christ comme horizon de l'Évolution. C'est beau. Magnifique.

Or il y a, au début du livre, une étonnante citation d'un certain Philippe Solal, qui déclare que dans la Noosphère toutes les pensées ne sont pas humaines.

La Noosphère, rappelons-le, est, pour Teilhard de Chardin, la sphère psychique qui entoure la Terre et est faite de l'activité pensante humaine. Mais Philippe Solal affirme qu'elle contient aussi des pensées d'êtres non incarnés, ce qui est fort et beau, car cela justifie et explique les anges, les elfes et les extraterrestres. On renoue avec Victor Hugo disant que l'échelle des êtres continue au-dessus de l'humanité dans l'invisible – alors que des générations de 27b59-internet-map.pngmatérialistes se sont disputés entre ceux qui croyaient que l'homme était le seul être pensant et ceux qui croyaient que les extraterrestres étaient des êtres physiques comme nous. Pour la première fois depuis le Romantisme, un homme ose dire, comme le faisait la Scolastique, qu'il existe aussi des personnes sans corps physique, des êtres pensants sans cerveau!

Car Teilhard de Chardin, à la manière catholique habituelle, ne se frottait pas à la question des anges. Mais voici qu'un savant utilise le vocabulaire scientifique pour parler d'eux à son tour.

Le livre de Philippe Marlin est agréable et plaisant; il touche au divin par affleurements – citant même Lovecraft affirmant que par le rêve on s'affranchit parfois du monde physique, pour entrer dans un autre. D'où l'écriture Watan, sans doute.

 

dimanche 6 décembre 2020

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LE DOSSIER ARKHAM, Alex Nikolavitch

 


Alex Nikolavitch fait fort avec Le Dossier Arkham (Éditions Leha, 1920) et nous prouve s’il en était besoin que la fiction néo-lovecraftienne se porte bien et peut encore nous surprendre agréablement. Le sujet est pourtant banal : un détective supposé s’appeler Mike Danjer est retrouvé mort, atrocement mutilé, dans son appartement à Arkham en décembre 1941. Un apparemment bien sûr fermé de l’intérieur. L’enquête ne débouchera sur rien. Mais il est proposé au lecteur un petit livret, joliment présenté, regroupant tous les papiers retrouvés chez la victime. Charge à nous d’essayer de démêler l’écheveau. On y trouvera des notes prises par des étudiants de la Miskatonic partis en recherche anthropologique dans la forêt de Dunwich, le compte-rendu de plusieurs excursions dans la sinistre cité d’Innsmouth, des documents sur une intrépide tentative d’exploration de plateau de Leng, sur une brève incursion dans les Contrées du Rêve ou encore le récit d’une recherche effectuée à Sanaa pour retrouver de la maison d’Abdul Alhazred. Le dossier est d’autant plus jouissif qu’il est truffé de clins d’œil humoristiques, comme l’eau des collines d’Arkham qui rend des couleurs, les conserves de fricassée de tentacules de la mère Gudule ou encore les pilules Randolph Carter pour renforcer la Foi. Quant aux personnages rencontrés, j’ai une petite faiblesse pour un certain S.T. qui après avoir professé à la Miskatonic s’est retiré dans un ashram dans l’Himalaya.

Bravo à Alex N.

vendredi 4 décembre 2020

JOSEPH ALTAIRAC A REJOINT LA BIBLIOTHEQUE DE L'IMPOSSIBLE

 


Caderonne, vendredi 4 décembre 2020

 


 

 

Joseph a enfin pu quitter ce monde sous forme d’une légère fumée s’échappant du Père Lachaise et prendre possession du bureau qui l’attendait dans la Bibliothèque de l’Impossible. 

 

 


Je le revois en 2009, alors que nous étions invités à dîner chez un ami, entamer une conversation passionnée sur les Sciences Zarbies avec son voisin de table. Et celui-ci de lui faire remarquer : « Sais-tu qu’il y a deux fous qui ont fait un gros bouquin très érudit sur les Terres Creuses ? ». Silence gêné qui se transformera en un immense éclat de rire ! « Je suis l’un des deux fous… »