jeudi 31 octobre 2024

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : NAKNA UHRUSHU, Steve

 


 

Nakna Uhurshu, Steve S. (Les Rêves de Cthulhu, 3, Chrysalide 2024) est le titre de la première longue nouvelle du troisième opus de l’excellent Steve. Mais aussi une petite déception pour ceux qui suivent cet auteur puisque reprise de ce qu’il nous avait déjà donné (Cf tome 1, 2021, Le Recueil). Mais cette déception va très vite se transformer en belle surprise, puisque la primo-nouvelle va être complétée, l’ensemble formant un roman consistant. Martin, dernier survivant de l’épisode précédent, a « chopé » le Grand Ancien au nom impossible, Nakna pour les intimes, qui cherche à prendre son contrôle, et vice-versa. Et un combat qui en vaut la peine puisque, le Grand Ancien bien maîtrisé peut fournir au savanturier une force incroyable. Et il en aura bien besoin pour échapper à l’armée russe qui est sur ses traces et à un potentat sanguinaire local gros consommateur de chair humaine. La saga prend la forme d’un récit d’heroic-fantasy, dans laquelle il est question d’aller se procurer un liquide susceptible de soigner un petit garçon russe qui a pris une mauvaise balle dans le crâne. Un liquide fabriqué et conservé par une redoutable divinité locale, le vodianoï. Un scénario dans lequel Steve va s’éclater et nous donner une fois de plus la mesure de son talent en matière de gore-dolby-stéréo.

On perd un peu ses repères, et l’injection d’une louche de mythologie slave donne au panthéon lovecraftien une allure un peu bancale ! Mais après tout, le Maître de Providence n’a jamais cherché à structurer ses créations !

MARIE MAITRE, UNE RÉCOMPENSE MÉRITÉE


 

mercredi 30 octobre 2024

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LA MORT DE BELLE, Georges Simenon

 


La Mort de Belle Georges Simenon, le Monde 2, 2024, VO 1952). Appartient aux romans « durs » de l’auteur. Une petite ville américaine sans saveur, un couple sans enfant et sans histoire, lui professeur au lycée, elle très occupée par ses activités sociales de « femme américaine ». Une ambiance à la « Stephen King » qui sera quelque peu troublée par l’arrivée de Belle, fille d’une amie de la mère, dans le rôle de jeune fille au pair et que l’on va retrouver sauvagement assassinée dans sa chambre. L’épouse était sortie ce soir-là, le mari Spencer bricolait dans son atelier et n’a rien entendu. Et là se met en branle chez Spencer une machine insidieuse de destruction psychologique, car s’il n’a pas tué Belle, il a le sentiment que tout le monde le regarde bizarrement et le considère comme étant certainement le criminel. On ne saura jamais, qui a tué Belle mais l’enquête de police montrera qu’elle n’était pas une oie blanche. Et on verra Spence dériver jusqu’à commettre sur une pauvre secrétaire innocente l’acte fatal qu’il ne pouvait qu’avoir commis. Glaçant !

TOUS A PLEUVEN

 


mardi 22 octobre 2024

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LA NEIGE ETAIT SALE, Georges Simenon

 


La neige était sale (Georges Simenon, le Monde 4, 2024 ; VO 1948) est assurément un chef d’œuvre du glauque de notre prolifique écrivain belche. Ce n’est pas à proprement parler un polar (la recherche par l’enquêteur du coupable), mais une véritable immersion dans la peau d’un tueur afin d’en démonter la mécanique. Un demi-siècle plus tard, l’anglais Colin Wilson, se livrera avec avec brio à cette même queste épuisante, épuisante puisqu’elle nous met face au problème du mal qui restera toujours un grand mystère pour l’humanité. Nous sommes dans une banlieue sordide (la ville n’est pas identifiée), durant les années d’occupation, en compagnie du jeune Franz Friedmaier, dont la mère tient un bordel pour les occupants et dont le père, officiellement inconnu, pourrait bien faire partie de ces sinistres soldats. La vie s’organise autour d’un douteux tripot, le « Timo », où Franz n’aura pas de difficultés à faire ses classes ; Meurtre gratuit, assassinat d’un militaire collabo, vols avec homicide, prostitution etc. Et toujours, comme ressort, faire le Mal, non par appât du gain ou simplement par gloriole, parce que c’est ainsi qu’il est fabriqué. Il finira par se faire arrêter, et se renfermera dans un mutisme absolu tout le long de sa détention. Rien n’aurait pu le faire craquer, pas même la perspective de son exécution tant l’idée de la mort était déjà parfaitement intégrée à sa construction mentale. Jusqu’au jour où ….. la visite et les tendres confidences d’une de ses anciennes tortionnaires lui remirent brutalement les pendules à l’heure et lui permirent de partir au peloton d’exécution le cœur noyé de bonheur. On n’est pas sans penser ici à La joie de vivre d’Émile Zola où l’on voit que la félicité peut toucher le plus malheureux et que la rédemption est toujours disponible pour qui sait la voir.

 

A noter une bonne adaptation en BD : Jean-Luc Fromental (scénario) et Bernard Yslaire (dessin), La neige était sale, Bruxelles, Dargaud, 2024, 104 p.

LOVECRAFT à LYON

 


mardi 1 octobre 2024

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : LE SECRET DU DIABLE, Christian Doumergue

Le secret du Diable

LLe thriller d’obédience castelrennaise s’essoufle, la diahrée éditoriale « post DaVinci Code » s’étant diluée avec le temps. Mais Christian Doumergue veille au respect de la Tradition et nous livre avec Le Secret du Diable (TDO 2024) un bon produit classique. Tous ces récits se ressemblent en effet, partant de l’enrichissement mystérieux du curé aux hypothèses les plus folles pour tenter de cerner l’origine des fonds concernés. Il y est souvent ajouté la découverte de documents mystérieux dont le décodage remettrait en cause la lignée dynastique française, voire permettrait de localiser un « tombeau sacré » dans le Razès. Il s’agit de ce qu’on appelle « La Belle Histoire » empruntée par chaque auteur pour tester sa propre solution. En fait, ce qui différencie les différents écrivains, c’est moins le fond de l’affaire (trésor des Wisigoths, tombeau de Marie-Madeleine) que la technique utilisée pour résoudre le mystère. Chez Doumergue, on est dans la famille du roman policier. Un meurtre dans le domaine de l’abbé nous entraîne dans une plongée bien croquée dans le milieu des chercheurs, avec une belle analyse des motivations de ces « savanturiers ». Car on trouve de tout dans cette famille, du banal appât du gain à une recherche douteuse du pouvoir. Avec une fascination -et l’auteur sait de quoi il parle- pour cette passion qui dévore la majorité de ses membres, les amenant parfois à franchir la ligne rouge. Doumergue flirte ici -et c’est ce qui rend son ouvrage touchant- avec la métaphysique qui l’amène à s’interroger lourdement, et de façon désespérée, sur l’origine du Mal.