J’adore les
pastiches holmésiens ; j’adore les récits néo-lovecraftiens. Et les
crossover entre les deux genres sont une de mes friandises préférées. Aussi Sherlock
Holmes et les Ombres de Shadwell de James Lovegrove (Bragelone 2018) a-t-il
à priori tout pour plaire, d’autant plus que l’objet, avec sa tranche dorée,
est magnifique. Mais cela commence mal, avec une histoire emberlificotée de
manuscrit reçu par l’auteur, qui est d’une branche éloignée de la famille
Lovecraft, avec pour instruction de le mettre dans un coffre après lecture et
de l’oublier. Un artifice qui n’était pas vraiment nécessaire.
Le récit est
celui du Dr Watson qui raconte la vérité sur sa rencontre avec Holmes et qui
nous explique que tout ce qu’il a écrit par la suite n’est que de la poudre aux
yeux pour dissimuler l’atroce vérité : les Grands Anciens sont de retour
et réclament leur dû.
Récrire le
Mythe Holmésien à la lumière du Mythe de Cthulhu est un exercice audacieux, mais
périlleux. Et l’auteur n’arrive pas à convaincre, car les ficelles sont grosses
et donnent à l’ensemble un caractère très téléphoné. On démarre avec d’étranges
meurtres dans le quartier de Shadwell, les victimes étant retrouvées dans un
état de maigreur squelettique, comme complétement « vidées ». Holmes
découvre l’existence des Grands Anciens après avoir absorbé une drogue proposée
par un chinois des plus louches alors que Watson se souvient d’avoir visité un
temple de l’horreur lors de sa campagne militaire en Afghanistan. Et de se
livrer à des recherches érudites dans le Département des Livres Réservés du
British Museum. Las, l’ouvrage convoité, le Necronomicon,
a été dérobé au grand dam de la bibliothécaire. La fiche de consultation
indique que le dernier lecteur est un certain Moriarty. Le reste s’enchaîne
sans surprise : Moriarty a conclu un pacte avec Ceux du Dehors dont il
doit assurer la nourriture. Holmes, son frère Mycroft, Watson et un inspecteur
de police seront les prochaines proies. Et on a droit à une interminable scène
de bagarres dans un souterrain sous une église de Shadwell où, bien sûr, la
créature émergera du lac enfoui. De façon curieusement hérétique, le monstre
écailleux aux nombreux tentacules n’est pas Cthulhu mais Nyarlathotep. Ouf,
Moriarty sera vaincu, on ne s’en doutait pas…
Deux autres
ouvrages sont annoncés pour poursuivre la réécriture de la saga holmésienne.
Espérons que l’auteur fera montre de plus d’originalité !
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