Bob Price nous propose ensuite une autre nouvelle culte de Machen, Le Peuple Blanc, écrite du reste avant la précédente (Le Grand Dieu Pan, 1890). Un récit envoûtant qui prend la forme du journal d’une petite fille qui vit au milieu de la forêt avec son père (un avocat très occupé) et sa gouvernante. Celle-ci, très au fait des coutumes et légendes de la région, lui raconte des histoires à la fois merveilleuses et terrifiantes sur le petit peuple qui hante les bois et sur les cérémonies secrètes qui s’y déroulent. L’enfant explorera dans les moindres détails la contrée environnante, le Pays de Voor, ce qui nous vaut des descriptions sublimes qui ne sont pas sans évoquer Le Domaine d’Arnheim que Poe avait publié en 1847. Elle découvrira, au fil de ses contacts avec les esprits des lieux, de nouvelles langues, comme la langue Chian ou les lettres Aklo ; elle refusera de nous en dire plus sur les Nymphes, les Dôles, ou sur Jeelo ou les Voolas.; elle contemplera les grands beaux Cercles et participera aux jeux Mao. Son journal se terminera par un cri d’émerveillement « j’ai vu les nymphes, je les ai appelées et Alanna, la nymphe de l’obscurité est venue ». La gouvernante disparaîtra et on retrouvera la petite fille empoisonnée, gisant près d’un objet à moitié enfoui : une magnifique et lumineuse statue d’un Dieu romain. A l’instar de Mary dans Le Grand Dieu Pan, elle a vu l’indicible.
Nouvelle exploration du Mal Absolu, ce texte est également très intéressant par ses créations imaginaires, notamment linguistiques. A l’instar de Lovecraft avec son Necronomicon, Machen suggère sans donner de contenu précis, technique bien connue pour étoffer l’aspect mystérieux de son invention. Les lettres AKLO connaîtront du reste une belle postérité : L'Aklo a été appris par Wilbur Whateley (HPL: The Dunwich Horror) et utilisé par Alonzo Typer (HPL: Le Journal d'Alonzo Typer). Il apparaît également comme un élément clé de l'œuvre sur le Mythe de Cthulhu d'Alan Moore, The Courtyard. D’autres y verront une étrange consanguinité avec le langage énochien du Dr John Dee.
Pour les « complétistes », on signalera que Daniel Harms consacre une entrée à l’Aklo dans son Encyclopedia Cthulhiana (1998) : « Langage qui était originellement celui des Hommes-Serpents de Valusie[1]. Il est encore utilisé sous une forme modifiée par les prêtres au service des Grands Anciens ainsi que par le Petit Peuple du Pays de Galles. Le terme « Aklo » peut aussi se référer à une série de rituels magiques ou désigner un moment précis où une incantation peut être prononcée… » Enfin on ne peut pas conclure sans signaler le site https://app.memrise.com/course/92726/aklo-building-upon-rlyehian/ qui propose un cours par correspondance sur l’aklo (et le rlyehian) ! Et c’est gratuit…
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