Philippe Marlin et les extraterrestres
L’éditeur Philippe Marlin, patron de l’Œil du Sphinx, a récemment sorti un livre d’entretiens avec le conteur Claude Arz: il l’a interrogé sur sa vie. L’ouvrage est intitulé: Philippe Marlin, un enfant de Planète. Planète est la défunte revue dirigée principalement par Jacques Bergier et mêlant science-fiction et ésotérisme: Philippe Marlin, en la lisant, a eu une révélation!
Un texte passionnant, qui éclaire largement sur les mystères de Rennes-le-Château – dont l’auteur est spécialiste, et dont j’ai souvent entendu parler, même avant d’habiter tout près.
Il parle aussi du pech de Bugarach et de ses secrets – ainsi que de ceux qui y ont attendu les extraterrestres en 2012, date prévue de la fin du monde. Les légendes locales parlent plus modestement d’un dragon, caché ou enterré sous sa masse.
Dans cette région gauloise, Philippe Marlin a un jour vu un objet non identifié dans le ciel. C’était un soir, à Lavelanet, ville autrefois très active dans le textile, comme l’ensemble des départements de l’Aude et de l’Ariège. Ce n’est plus tout à fait la même chose.
Philippe Marlin a soudain aperçu, avec d’autres, un objet plus noir que le ciel nocturne, qui a vite disparu.
Il y a des miracles. Le doigt de Dieu, comme disait Amiel, est souvent sensible, dans l’existence. Mais pour moi, je ne me souviens pas avoir rien vu d’extraordinaire, dans le monde, sinon des hommes et des femmes dotés d’un esprit, des hommes et des femmes pensants, reflétant la divinité. Cela dit, il y a peut-être des penseurs sans corps, dans l’atmosphère – ou sous la terre, même, vivant l’enfer bien connu. Parfois la pensée cristallise, peut-être, des éléments physiques, et des soucoupes volantes apparaissent!
Philippe Marlin se passionne depuis des décennies pour les mystères, et il a écrit au moins un livre sur celui de Rennes-le-Château, l’abbé Saunière et la lignée mérovingienne remontant à Jésus. J’ai été initié à cela par le poète genevois Charles P. Marie, mais comme il n’y avait dans cette histoire ni extraterrestres, ni anges, ni elfes, je suis demeuré sceptique. D’ailleurs, les mérovingiens étaient reconnus fainéants; pourquoi se réclamer d’eux? Peut-être parce qu’au fond leur paresse favorisait l’arabisme du temps, très présent en Occitanie, et que de cet arabisme sont sorties des choses que le romantisme a consacrées: la tradition aristotélicienne conservée par l’Orient, avec son lot de gnose, et donc le catharisme et les troubadours. Car la vénération des dames initiées nous rappelle la tradition des chansons de geste qui voyait des chevaliers francs épouser des princesses sarrasines converties au christianisme, après la mort au combat de leurs maris. Que l’Islam médiéval ait contenu de la gnose est attesté par Henry Corbin. Et ainsi, l’éloge des mérovingiens face à l’activisme des carolingiens, trouverait sa solution karmique dans cet attrait de la culture propre au Languedoc médiéval. Il y a là une logique, je pense.
Quant aux extraterrestres, ils sont aussi issus de cette tradition qui unissait les éléments physiques aux mystères, à la magie, dans la tradition arabe antique. Il y a quelque chose en eux des houris. La science dont ils seraient les dépositaires rappelle les trésors de philosophie que possédaient les Arabes dans les temps anciens, et dont attestent les chansons de geste: les Francs ébahis vainquaient de véritables mages, soutenus qu’ils étaient par les anges venus de plus haut que les extraterrestres ou les houris, les princesses initiées et les automates merveilleux des cités d’Orient. Leur foi le leur permettait. Mais le romantisme a trouvé cela prosaïque. En un sens, on le comprend. Même la science-fiction est issue de tout cela.
Or, je ne la déteste pas: loin de là. Je suis aussi sensible à cette tradition, trouvant les anges de la Bible parfois trop abstraits, manquant trop de beauté accessible aux sens. Tolkien même a corrigé cette tendance malheureuse en créant de formidables Elfes dont les bateaux franchissent les atmosphères.
Beaucoup d’amis de Philippe Marlin ont tenté de démontrer l’existence des extraterrestres, et lui-même s’avoue sûr qu’il y a derrière le visible des présences agissantes et bienveillantes, des êtres, traversant le temps et l’espace et échappant aux lois physiques, tout en conservant un lien avec elles.
Il y a dans certains groupes ésotériques la croyance en une espèce qui a jadis été physique mais a peu à peu appris à s’en libérer. Elle sert de modèle à l’humanité. Elle l’aide en secret.
Philippe Marlin évoque en outre l’hypothèse plausible d’une intelligence cosmique, d’une loi de l’univers qui le tire vers toujours plus de conscience – comme le concevait Pierre Teilhard de Chardin. Peut-être est-ce cette intelligence cosmique qui a éduqué les extraterrestres; mais comment s’y est-elle prise? Cela reste à déterminer. Je crois quand même aux anges de la Bible.
Car entre la puissance suprême et les phénomènes paranormaux, il reste une brisure, un fossé qui n’est pas toujours comblé. Olivier Costa de Beauregard déjà en parlait, et il conseillait de résoudre le problème par les mythologies asiatiques. C’est un peu ce qu’a fait H. P. Blavatsky, de mon point de vue.
Philippe Marlin ne la cite pas, mais il cite abondamment, par contre, H. P. Lovecraft, qui l’a également fait, à sa façon, et J. R. R. Tolkien, donc.
La galerie de personnages qui entourent Philippe Marlin est fascinante, il a des amis remarquables, des chercheurs de mystères, des admirateurs de Lovecraft. L’un des plus célèbres est le regretté Joseph Altairac, parti pour l’autre monde ces derniers jours, et avec lequel j’ai un peu correspondu sur Internet. Il était très rationaliste, et n’approuvait pas toujours mes vues, notamment sur Lovecraft. Mais j’ai conversé avec plaisir avec lui, c’était un homme avisé. Il est mort bien jeune, c’est dommage.
Entre les lois physiques et le mystère de la divinité, que se trouve-t-il? Lovecraft proposait des êtres physiques qui par leurs pouvoirs psychiques pouvaient défier les lois physiques, s’en arracher. C’était paradoxal et impressionnant. Cela permet de mêler la rêverie et la science, et Philippe Marlin est largement de cette ligne. Comme le fossé entre les extrêmes ne peut être comblé que par l’imagination, il affirme avec raison que la littérature populaire en dit souvent plus que la science officielle. Je l’ai toujours pensé aussi!
J’aime aussi chez Philippe Marlin l’amour des traditions de sa région des Ardennes. Et l’enracinement avoué dans la tradition catholique! C’est sous ce rapport qu’il fait le plus penser à Olivier Costa de Beauregard: il reconnaît que le lien entre la Vierge et Jésus d’un côté et l’intelligence cosmique pressentie par l’humanisme scientifique de l’autre, n’est rien moins que clair. Il suggère, seulement, la possibilité d’une incarnation de cette intelligence cosmique. Il rappelle encore en cela Teilhard de Chardin.
Le livre de Philippe Marlin est en tout cas piquant, amusant, agréable à lire. De surcroît, il me cite dans les remerciements, me présentant comme un nouveau barde du Razès. C’est très flatteur. Merci.
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