Ce livre a une histoire odésienne. A l’origine,
cela devait être un travail commun entre Octonovo (Laurent Buchholtzer) et
Geneviève Beduneau. Mais très vite, les chemins se sont séparés. Octonovo ne
retenait de Plantard que son aspect de sinistre mystagogue alors que Geneniève
voyait en lui un distingué symboliste. Octonovo fera une synthèse brillante de
sa recherche pour Politica Hermetica alors que notre amie poursuivra
(avec l’aide de Bernard Fontaine de la FNAC) son travail sous le nom
de projet « Plantard par les textes ». Elle patouillera pas mal et n’arrivera
jamais à prouver son intuition, à savoir que le Grand Nautonnier était manipulé
par des groupes occultes. D’un commun accord, nous avons convenu que ce livre n’était
pas pour l’ODS car, malgré les belles analyses symboliques de Geneviève, il n’apportait
rien à ce que l’on connaît sur le personnage.
Un bon résumé de Rémi Boyer :
Qui êtes-vous
Monsieur Plantard ? de Geneviève Béduneau. Éditions Dervy
Geneviève Béduneau nous a quittés avant d’achever ce livre, fruit
de recherches minutieuses sur les écrits laissés par Pierre Plantard, qu’elle
cherche à réhabiliter, et ses collaborateurs. Pour Geneviève Béduneau,
l’affaire du trésor de Rennes-le-Château est un leurre.
En introduction, elle tente d’identifier les influences ou
héritages supposés qui ont conduit Pierre Plantard à concevoir son Prieuré de
Sion. Il y est question notamment de Pierre Monti et des Alpha-Galates.
Geneviève Béduneau tente de mettre en évidence une vision du monde
plantardienne tout en expliquant sa méthode :
« Il s’agit dans cette étude d’analyser le tissu mythique
présent dans les textes de Pierre Plantard et, ainsi, de voir où il conduisait
vraiment ses disciples, quelle vision du monde –consciente ou inconsciente –
sous-tendait ses prétentions « mérovingiennes ». A la lecture de ce
corpus, on est frappé d’une étrange continuité dans le mode d’écriture, le type
de pseudonymes utilisés, le style, l’attaque des thématiques, comme si de sa
jeunesse à sa mort Plantard n’avait évolué ni dans sa pensée ni dans sa
phraséologie ? (…) Cette continuité, une fois étudiés les principaux
textes de Vaincre et le légendaire des Alpha-Galates qui, eu égard à la
période de rédaction, méritent une attention particulière, nous permettra
d’utiliser parfois une approche synchronique par regroupements thématiques
plutôt qu’une lecture chronologique. »
L’analyse des textes publiés dans Vaincre conduit Geneviève
Béduneau a suggéré que Pierre Plantard, dans ses écrits de jeunesse, ne fut
peut-être qu’un prête-nom ou qu’il fut poussé en avant pour dissimuler d’autres
personnalités peu pressées d’être identifiées. La période ne se prête guère à
la parade.
Après la guerre, c’est la revue Circuit qui sert de
véhicule à la pensée de Pierre Plantard. Écrits sans intérêt se mêlent à des
écrits plus intéressants du point de vue ésotérique qui traitent des
préoccupations courantes dans les milieux occultistes de l’époque. Puis
Geneviève Béduneau s’intéresse à l’hermétisme de Gisors avant de revenir aux
textes confidentiels déposés par Pierre Plantard à la BNF.
Pierre Plantard ne cesse de mêler réalités et fictions, vrais
personnages et personnages inventés. Il est un joueur, sinon un manipulateur,
un peu escroc aussi, d’ailleurs condamné. Mais, Geneviève Béduneau le souligne,
on fait dire à Plantard beaucoup de choses qu’il n’a jamais évoquées.
Beaucoup d’imaginaires se mêlent dans cet ensemble sans que les
logiques propres à la vie des mythèmes, explicitées par Gilbert Durand, soient
repérables. Il est bien possible que ce qui apparaît comme un fatras ne soit
qu’un fatras. Bien sûr, il y aura toujours des personnes qui trouveront du
sens, hors toute rigueur scientifique, philosophique ou initiatique.
La création de Plantard fascine. Geneviève Béduneau suggère que
cette fascination fait partie d’un projet occulte. Pourquoi pas ? Mais
elle n’est guère convaincante en évoquant le projet d’Arginy ou les rivalités
coutumières entre sociétés dites initiatiques. On surestime beaucoup dans
certains microcosmes ésotériques l’action et l’influence de ces sociétés dont
Robert Amadou disait que « Parfois, elles rendent service. »
Nous sommes, avec ces questions, à contre-sens des voies
initiatiques qui veulent libérer l’être de ses conditionnements et histoires
personnelles. Tout au contraire, on développe des rêves toxiques qui ne font
qu’ajouter de la confusion.
Reste ce que Geneviève Béduneau désigne comme la « Belle
histoire », qui alimente une certaine littérature populaire.
Rémi Boyer
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire