Documentaire
- Strange is Normal: The Amazing Life of
Colin Wilson (Reality
Films UK, 2010, par Philippe Gardinier et Dennis Price). (Chronique de
George Ward © sur colinwilsonworld traduite par Philippe Marlin)
Pendant un demi-siècle, Wilson a été
l'une des figures principales du panthéon de la science et de la philosophie « alternatives
», un pionnier intrépide dans les études de la conscience, ainsi que l'un de
nos romanciers, critiques et théoriciens littéraires les plus novateurs.
Cependant, bien que ce film
reconnaisse la valeur de Wilson et constitue une introduction utile à ses
idées, il présente malheureusement de sérieuses lacunes. De manière curieuse, s’il
traite des moments clés et des points marquants de la longue vie de Wilson, il
met beaucoup trop d'accent sur les célébrités qu'il a rencontrés au cours de sa
carrière au détriment d’une analyse en profondeur de ses travaux. Il y a ici un
contre-sens fondamental. Wilson ne s’est jamais intéressé à la célébrité et ne
l’a jamais recherchée.
De même, l'entrevue finale de cinq
minutes avec Joy Wilson ne pose pas la question cruciale attendue par tous :
Qu’est-ce que ça représente pour vous d’avoir vécu 50 ans avec cet homme ?
Au lieu de cela, nous avons droit à une batterie d’interrogations sur les
personnes en vogue qu'elle a croisées.
Je pense que le problème réside dans
l'approche plutôt légère et timide de Dennis Price pour conduire l’interview
alors qu’une attitude plus rigoureuse, ou tout simplement plus journalistique,
aurait permis de tirer plus de substance de l’écrivain.
Par exemple, l’« existentialisme »
n'est pas mentionné, bien que la couverture du livre de Wilson de 1966, Introduction au nouvel existentialisme,
apparaisse dans le film (avec des images de nombreux autres titres de Wilson).
C'est une lacune majeure, car ce «nouvel existentialisme» reste, depuis sa
formulation il y a un demi-siècle, un grand défi pour la philosophie
occidentale.
L’essentiel du film est une entrevue
en face à face avec Wilson à son domicile à Gorran Haven, à Cornwall,
entrecoupée de séquences offrant une visite guidée (caméra à la main) de ses
bibliothèques qui contiennent des dizaines de milliers de livres et qui
débordent dans un jardin qui ressemble à une jungle. Le moment le plus fort est
certainement le balayage des thématiques de Wilson explorées dans au moins 120
livres, avec pour toile de fond sa profonde conviction que l'humanité est sur
le point de réaliser un bond en avant, eu égard au potentiel inexploité de
l'esprit et au pouvoir de l’imagination. Sont également abordées les
thématiques des NDE et des phénomènes parapsychologiques.
Wilson parle encore de ses études
sur les tueurs en série et de sa correspondance de 10 ans avec le meurtrier des
Maures Ian Brady ; il évoque sa critique des grandes figures littéraires,
le but de l'univers dans lequel il voit une intelligence sous-jacente et le
fait que nos esprits peuvent influencer notre destinée.
Nous l’écoutons évoquer sa vie à
Leicester, son « glissement » de la science à la littérature, sa
fascination adolescente pour le suicide jusqu’à ce qu’il se rende compte que
c'était de plus de vie qu'il avait besoin et pas de moins, son passage dans la
RAF, son premier mariage, le préjudice médiatique qui a frappé avec force la
publication de Religion et Rebel, les
conséquences du succès de The Outsider
et comment il a toujours senti qu'il avait « nagé contre le courant » de la
pensée dominante
Il raconte son association avec le psychologue
existentiel américain Abraham Maslow dans les années 1960 et son enquête de
quatre décennies sur « les expériences de pointe » - ce moment où la perception
fait place à des visions ineffables d'une réalité supérieure – et qui sont la
clé de notre développement évolutif.
Le titre du film, pour sympathique qu’il soit,
ne reflète que très partiellement la riche aventure intellectuelle de Wilson :
comment il a été impliqué dans le mouvement des « jeunes hommes en colère » des
années 1950, ou de ses explorations des civilisations anciennes certainement beaucoup
plus avancées intellectuellement et technologiquement que ce que nous offre la
science conventionnelle.
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