Thomas Gottin, doctorant à l'université de Montréal (Canada), et originaire de Toulouse, est donc venu sur place pendant deux ans. Il a effectué un véritable travail de terrain au titre d'une démarche anthropologique.
Des notes qu'il a prises, il a fait un livre (un mémoire de master) publié aux éditions "L'Œil du Sphinx", à Rennes-les-Bains. Son titre ? "Le phénomène Bugarach".
Un thème qui a séduit Philippe Marlin, l'éditeur. L'homme connaît bien le milieu de la Haute-Vallée.
Il y habite depuis plusieurs années : "A Bugarach, dit-il, on peut rencontrer deux sortes de gens bizarres. Il y a les sectaires, avec lesquels il est impossible de discuter. Puis il y a ceux qui cherchent, se questionnent et qui pensent qu'on peut trouver une réponse, un apaisement".
Ce sont précisément ces derniers que Thomas Gottin est allé rencontrer. Jusqu'à participer avec eux à des stages dits de "développement personnel" : "Il y avait là des Belges, des Canadiens, des Français... Tous appartenaient à des classes sociales plutôt aisées et c'étaient essentiellement des femmes. Le stage coûtait 400 € la semaine".
Et c'est ainsi qu'il a pu plonger au cœur du mouvement "Next Age" qui privilégie l'individu, l'expérience transformatrice : "D'ailleurs, je pense que Bugarach est en train de devenir un véritable centre de pèlerinage contemporain".
L'anthropologue a été très marqué par son immersion : "J'ai vécu avec des gens -dont très peu sont athées- en quête de sens, éprouvant le besoin de se restructurer suite à des problèmes psychologiques douloureux : ils voulaient donner un sens à leurs malheurs. La plupart était là d'abord parce qu'ils avaient été fascinés par les mythes cosmogoniques entourant Bugarach, et parce qu'ils avaient lu des livres comme 'L'Alchimiste' ou bien 'La Prophétie des Andes' et parce qu'ils rejetaient la religion officielle, notamment catholique".
Selon Thomas Gottin, la démarche de ces hommes et femmes relève de ce qu'il appelle "une spiritualité de la guérison". Pendant le stage il a ressenti "beaucoup d'amour entre les gens, et le besoin de retrouver la nature. Je pense que ça s'inscrit dans le retour d'un néo-paganisme européen".
Il compare ces stages à des thérapies de groupes : "Tout le monde y trouve son compte, quelles que soient les origines confessionnelles : catholiques, protestantes, shintoïstes, bouddhistes... La raison ? Parce qu'ils découvrent de nouveaux mouvements religieux qui ne sont pas dogmatiques comme les religions officielles".
Mais le jeune anthropologue a surtout noté le rôle fondateur du mythe dans le phénomène Bugarach : "Il est centré autour d'une montagne. Ce qui n'est pas nouveau dans l'Histoire : pensons au Mont Sinaï, au Mont Moïse...". Sauf que cette fois-ci, la montagne a accouché d'une souris : celle des ordinateurs qui permettent d'accéder à internet, premier site mondial de pèlerinage où Bugarach étend sa toile.
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