Le texte du quatrième de couverture ouvre l’appétit :
Sur un tel sujet, que restait-il à dire ? TOUT ! Ce livre dévoile entre autres :
1) le rôle véritable du « baron » Rudolf von Sebottendorf, le fondateur islamisant de la fameuse Société Thulé,
2) La réalité historico-mythique qui se dissimule derrière cet Ordre du Dragon Vert auquel fut affilié Karl Haushofer, le père de la géopolitique nazie,
3) L'identité des mystérieux « Soixante-Douze » dénoncés à la face du monde, dès 1919, par le ministre allemand Walther Rathenau.
Mais il ne s'agit pas seulement d'éclairer un passé tragique. Hitler, en effet, a déclaré : « Je sais que je ne suis pas Celui qui doit venir ». De qui donc le Führer - marionnette du diable - fut-il le PRÉCURSEUR ? Il est urgent de le dire : le nazisme, « allié objectif » d'un messianisme islamique dévoyé, prépare aujourd'hui, depuis des bases secrètes, la plus apocalyptique des revanches. C'est pourquoi cet ouvrage est plus qu'un livre d'histoire. C'est un AVERTISSEMENT.
(4 de cover).
La réédition par Camion Noir de cet ouvrage m’a donné envie de réviser ce « classique » car on sort en effet toujours très perturbé par la lecture d’un ouvrage de Robin. Une culture immense, une belle sensibilité pour tout ce qui touche à l’ésotérisme et au symbolisme ; une admiration inconditionnelle de l’œuvre de René Guénon, qu’il considère comme sa boîte à outil. Mais une mystagogie que je qualifierai de bonne foi, ce qu’il l’amène à avaler des couleuvres qui deviendront par la suite ses tables de la loi. Robin balaye d’un revers de la main les poncifs les plus lourds : non, il n’y a pas d’ésotérisme nazi ; non Hitler ne cherchait pas à réveiller un quelconque culte de morts sous l’autorité de Divinités Germaniques. Son analyse est plus subtile. Il se base sur les travaux de Jung et envisage qu’au fil des Éons, certains Archétypes particulièrement puissants puissent prendre « leur autonomie ». Hitler ne serait-il pas possédé par l’une de des manifestations dont le but serait de préparer la venue de l’Anté-Christ, et au final l’Apocalypse.
Le message que nous délivre l’écrivain de Vendôme est cependant brouillé, par l’autres ondes, venant cette fois du Moyen-Orient : il existe en effet une légende, parallèle à celle de l’Empereur Germanique endormi, faisant état de l’existence d’un Grand Mâddi, lui aussi dans les starting blocs. Et de nous resservir la tradition des 7 Tours du Diable, chère à Guénon, censée protéger l’Occident des Ires de l’Orient. Et justement, l’un de ces monuments mythiques ne serait-il pas en train de se lézarder ?
Au total, un plat intéressant mais difficile à digérer que l’on ne peut comprendre qu’en se rattachant aux arcanes de Robin : la lutte entre l’initiation (bien) et la contre-initiation (mal), la nécessité d’accélérer la décomposition de notre vieux monde miné par la religion chrétienne et laisser place à la Parousie. Il ne sera pas du reste inutile, pour assister à ce phénomène grandiose, d’aller faire un petit tour par Rennes-le-Château.
AP2C2, la question des Tours du Diable (251 pages)
PM, étude des Magiciens du Nouveau siècle, cf 2020)
a) Pas facile d’analyser ce chapitre qui fait 251 pages, soit près du quart du bouquin. Pour bien comprendre, il faut se replonger dans la philosophie ésotérique de René Guénon qui inspire profondément l’auteur : il existe, aux côtés de l’initiation véritable qui cherche à rétablir l’homme dans son état originel, une contre-initiation, sorte de démarche inversée qui conduit aux résultats contraires et qui prend sa nature de « sataniste » lors du dernier cycle, celui du Kali Yuga. AP2C2 part d’un livre de William Seabrook, Aventures en Arabie (1933), faisant part de l’existence de « sept Tours du Diable »[1], établissant une frontière symbolique entre l’Orient Traditionnel et l’Occident. René Guénon apprendra l’existence de ces « monuments » lors de trois échanges de correspondance avec son ami Seabrook et en rendra compte dans Études Traditionnelles. Jean-Marc Allemand y consacrera un ouvrage, René Guénon et les Sept tours du Diable chez Trédaniel en 1990. Le quatrième de couverture résume bien la problématique : Le présent livre n'est ni une compilation, ni une nouvelle biographie sur René Guénon. L'auteur, dans une analyse minutieuse, situe géographiquement les sept tours du diable qui, selon Guénon, sont les centres de projection des influences sataniques à travers le monde. Les résultats funestes de leur action, tant en Orient qu'en Occident, sont inexorablement fiés au déroulement de l'actuel Age sombre. Cette étude nous donne aussi d'intéressantes précisions sur les incessantes attaques de toutes sortes que René Guénon le " Serviteur de l'Unique " eut à constater et contre lesquelles il opposa tout au long de son existence une parfaite rectitude et une orientation inébranlable. Pour corser le tout, ajoutons qu’Aleister Crowley, ami de Seabrook, était bien au courant de ce dossier dont il avait pris connaissance lors de sa carrière d’agent secret !
b) Ces fameuses tours sont donc le vecteur de tous les malheurs qui s’abattent sur l’Occident (le terrorisme islamique est évoqué) et annoncent évidemment « la Fin des Temps ». L’auteur va traquer tout au long des pages les signes de cet effondrement programmé par une analyse incroyablement érudite de l’histoire ésotérique de l’Orient. Tout y passe, des civilisations préhumaines à l’Agartha, de Thulé à l’Hyperborée, des Tours Sombres de Stephen King à la Cimmérie de Conan le Barbare, sans oublier Les Neufs Inconnus de Talbot Mundy et les expéditions tibétaines de Nicolas Roërich. Ce qui est frappant, dans les références proposées, c’est ce que j’appellerai la méthode de l’horizontalité : mettre sur le même plan d’authentiques chercheurs comme Louis de Maistre[2], Henri Corbin ou Mircea Eliade et des écrivains plus romantiques comme Charroux, Von Däniken, Gurdjieff, Blavatski, Anton Parks, Sitchin, David Icke… Une place de choix est réservée à Jean Robin[3] qui est cité 61 fois (sur 251 pages) et qui est en fait le fil conducteur de l’auteur. S’il est vrai que le penseur de Vendôme est un sympathique érudit, sa mythomanie brouille en permanence les cartes et jette un doute certain sur sa crédibilité. La façon dont AP1C2 utilise son dernier ouvrage sur Lovecraft (Howard Phillips Lovecraft et le Secret des Adorateurs du Serpent, annexe) me laisse perplexe : nous sommes certes dans une eschatologie noire, mais de voir comme manifestation de cette dernière le retour des Grands Anciens, créatures imaginaires du Prince Noir de Providence, me met particulièrement mal à l’aise. On peut du reste se demander si le rédacteur connaît l’œuvre de Lovecraft (en dehors de sa lecture de l’ouvrage de Jean Robin) lorsqu’il évoque la cité mythique d’Irem, popularisée selon lui par l’écrivain de Nouvelle-Angleterre dans Les Engoulements de la Colline (The Wippoorwills in the Hills, 1948). Or cette nouvelle n’est qu’un médiocre pastiche d’August Derleth, la primo nouvelle de Lovecraft étant La Cité sans Nom (The Wolverine, 1921).
c) On ne sera pas autrement surpris de relever, en conclusion, que cette copieuse étude baigne, une fois encore, dans un conspirationnisme caricatural : Chacun connaît en effet le rôle trouble que peuvent jouer les États-Unis en arrière-fond de la géopolitique mondiale et de nombreuses personnes les soupçonnent d’influencer dans l’ombre les mouvances djihadistes qui ensanglantent le Moyen-Orient depuis plus de trente ans.
[1] Leur localisation est assez imprécise, mais on parle de l’Irak (Yézidis), de la Sibérie/Turkestan, de la Syrie, du Soudan, du Soudan. On parle aussi de Lyon, de la Belgique et de la Californie.
[2] Louis de Maistre, L’Énigme René Guénon et les “Supérieurs Inconnus”. Contribution à l’étude de l’histoire mondiale “souterraine”, Archè, Milano 2004.
[3] On regrettera l’absence d’index nominem dans cet ouvrage.

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