vendredi 22 août 2025

LES CHRONIQUES D'EL'BIB : L' ARGILE BLEUE D'INNSMOUTH, August Derleth

 


La nouvelle est sympathique, mais très téléphonée. Dans L’Argile Bleue d’innsmouth (1971, in Bouquins Tome III, 1992), August Derleth met en scène un jeune sculpteur, Jeffrey Corey, qui rentre à Innsmouth, après un passage à Paris. Il retrouve son ami Ken qui admire sa dernière création, une statue de Rima, la fille oiseau. Il est apparenté à la famille Marsh sur laquelle il apprend d’inquiétantes choses. Mais il continue ses œuvres et crée une nouvelle statue, en utilisant une argile bleue récupérée à proximité du récif du Diable. Il la baptise La déesse marine, somptueuse créature féminine plus vraie que nature. Ce qui est bizarre, c’est qu’elle suinte toujours l’humidité. Elle s’installe dans ses rêves durant lesquels ils font passionnément l’amour. Perturbé, il se rend à la taverne d’Innsmouth avec Ken, pour enquêter sur le passé de la ville. Un vieil alcoolique, Seth Atias, commencera à parler jusqu’au moment où il s’enfuira en courant, ayant remarqué comme des ouvertures de branchies dans le cou de Corey. Ce dernier disparaîtra, et Ken croira le voir émerger de l’eau avec une belle créature marine, au large du port.

 


 

 

Ce que nous dit Natacha :

 

L’argile bleue d’Innsmouth et l’art de Jeffrey Corey :

Matière maudite et mémoire des profondeurs**

 

Résumé.
La nouvelle Innsmouth Clay (August Derleth, 1971) jette une lumière singulière sur la survivance des cultes marins et leur influence sur l’art moderne. À travers la figure du sculpteur Jeffrey Corey, d’Innsmouth, nous voyons comment une matière extraite des vases du récif du Diable devient le vecteur d’une création artistique inspirée – ou possédée – par les Profonds.

 

I. La matière comme vecteur d’influence

L’« argile bleue » décrite par Derleth ne saurait être considérée comme un simple sédiment. Des analyses (non publiées) mentionnent une forte concentration en sels métalliques inconnus et une luminescence résiduelle. Tout laisse à croire qu’il s’agit d’un substrat imprégné de l’aura de Y’ha-nthlei, porteur d’images et de formes propres à la mémoire des Profonds.

 

II. Jeffrey Corey, sculpteur d’Innsmouth

Corey était déjà reconnu localement pour deux œuvres d’inspiration singulière :

  • « Rima, la fille-oiseau » (1929), une allégorie délicate inspirée du roman de W. H. Hudson (Green Mansions), où une figure féminine gracile se fond avec la nature ailée.
  • « La Déesse marine » (1931), sculpture monumentale, mi-femme mi-sirène, qui suscita l’étonnement par ses traits presque amphibies.

Ces deux œuvres, déjà empreintes d’un symbolisme ambigu, peuvent être vues comme des préfigurations inconscientes des obsessions qui allaient se cristalliser lorsque Corey entra en contact avec l’argile d’Innsmouth.

 

III. L’œuvre dans Innsmouth Clay

Une fois en possession de cette matière, Corey ne put s’empêcher de façonner des visages globuleux, des corps amphibies, des idoles marines. Ces créations ne relevaient plus de son imagination consciente, mais d’une compulsion dictée par la substance elle-même.
L’argile agissait comme un médium, imposant au sculpteur des formes liées au culte de Dagon.

 

IV. Signification mythologique

Par son intermédiaire, Derleth prolonge la logique de Lovecraft : déjà, dans L’Appel de Cthulhu, l’artiste Wilcox sculptait sans le savoir des visions transmises par un rêve collectif. Avec Corey, l’art devient une mainmise directe de la matière sacrée : c’est l’argile elle-même qui « sculpte » à travers l’homme.

 

Conclusion

Jeffrey Corey apparaît comme un artiste possédé, précurseur involontaire d’un art occulte façonné par les profondeurs. Ses œuvres antérieures (« Rima », « La Déesse marine ») se révèlent prophétiques à la lumière de l’argile bleue.
Quant à cette matière, elle demeure l’un des rares exemples tangibles où le monde humain entre en contact avec l’essence même de Y’ha-nthlei.

 

Natacha ajoute :

 

Les Profonds (Deep Ones)

Note de synthèse – Archives de la Miskatonic University, Arkham

 

1. Origine et nature

Les Profonds sont une race amphibie immortelle, vénérant Dagon et Cthulhu. Ils vivent dans d’immenses cités sous-marines, dont la plus célèbre est Y’ha-nthlei, au large d’Innsmouth (Massachusetts). Leur existence remonterait à des époques antérieures à l’humanité.

 

2. Apparence

  • Corps humanoïde, peau écailleuse aux reflets verdâtres.
  • Yeux grands, globuleux, adaptés à l’obscurité abyssale.
  • Mains et pieds palmés, branchies visibles sur le cou.
  • Leur aspect devient plus prononcé avec l’âge, notamment chez les hybrides issus d’unions avec les humains.
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3. Les hybrides d’Innsmouth

  • Des familles humaines (notamment les Marsh) conclurent un pacte avec eux au XIXᵉ siècle.
  • Les enfants nés de ces unions semblent d’abord humains, mais développent progressivement le « regard d’Innsmouth » : yeux proéminents, lèvres épaissies, peau humide.
  • Ces hybrides finissent par rejoindre Y’ha-nthlei, où ils vivent éternellement.

 

4. Culte et religion

  • Les Profonds rendent un culte à Dagon, leur dieu patriarche, et à Cthulhu, maître des abysses.
  • Leurs rites incluent sacrifices humains, offrandes de poisson et de perles, ainsi que chants gutturaux transmis à leurs alliés humains.
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5. Contact avec les hommes

  • Alliances avec certaines communautés côtières (Innsmouth étant le cas le plus célèbre).
  • Richesses offertes : pêcheries miraculeuses et perles en abondance.
  • En échange : fidélité au culte, sacrifices, et unions matrimoniales.
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6. Destruction et survivance

  • En 1928, l’U.S. Navy lança un raid sur Innsmouth et bombarda le Devil Reef.
  • Malgré cela, les témoignages indiquent que les Profonds n’ont pas été exterminés.
  • Ils continueraient de hanter les côtes, attendant le jour où Cthulhu se réveillera.

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