mardi 21 octobre 2025

PRIONS SAINT-TOAD

  


 

 “St. Toad’s” (Sonnet XXIX des Fungi from Yuggoth)

“Into the churchyard where the saints have trod,
I wandered, seeking dreams and worlds of God;
But came instead to streets of endless stone,
Where Toad of Night held court upon his throne…”

(Traduction libre :

« Dans le cimetière où passèrent les saints,
Je cherchai des songes et les mondes de Dieu ;
Mais je trouvai plutôt des rues sans fin,
Où le Crapaud de la Nuit tenait sa cour sur son trône… »)


🕸️ Le sens du poème

Lovecraft évoque ici une expérience de rêve ou de transe, où le narrateur entre dans un espace sacré — l’église ou le cimetière de Saint-Toad — et s’y retrouve aspiré vers une cité labyrinthique.
Les vieillards qui l’avertissent du “cracked bell of Saint-Toad” (le carillon fêlé) semblent être des esprits ou des anciens adorateurs déchus.

Le “carillon fêlé” symbolise la cassure entre le sacré et le profane — le moment où le culte du Toad remplace celui du Christ.
C’est la corruption du son divin en un écho démoniaque.


🐸 Saint-Toad, figure ambiguë

“Saint-Toad” est évidemment ironique : il ne s’agit pas d’un saint chrétien, mais d’une déformation hérétique.
Le “saint” est ici une divinité déguisée, souvent identifiée, dans les exégèses postérieures (notamment par Robert M. Price et Lin Carter), à un avatar du dieu Tsathoggua — le crapaud endormi, dieu des ténèbres chthoniennes.

D’où l’association entre “Toad” et les profondeurs, l’obscurité visqueuse, la torpeur éternelle.

Dans la tradition mythe-hermétique (Institut Mytho-Hermétique de Bugarach, Bulletin XII), Saint-Toad représente :

« L’intermédiaire monstrueux entre la foi et la boue,
celui qui trône dans les cryptes de l’âme,
et dont la cloche fissurée annonce le retour des dieux limoneux. »


🏰 La Ville Labyrinthique

Le rêveur est mené à travers une ville où les rues se referment sur elles-mêmes, un symbole classique du labyrinthe spirituel.
Chaque carrefour devient une impasse, chaque porte ouvre sur un mur.
C’est la topographie du cauchemar, comme si Lovecraft projetait une cité gothique inversée, comparable à une R’lyeh urbaine.

La Flèche Noire qu’il aperçoit à la fin du poème est souvent interprétée comme :

  • soit le clocher noir de Saint-Toad, dernier vestige du temple maudit,
  • soit le pilon sacré du dieu Tsathoggua, dressé au cœur d’un rêve corrompu.

📜 Lecture ésotérique bugarachienne

« Saint-Toad est la première Eglise du Renversement :
là où la foi s’effondre dans le sommeil des pierres.
Son carillon n’appelle pas les vivants,
mais réveille les dormeurs du sol noir. »

— (Commentaire de Frère Armand Ferri, Le Carillon de la Nuit, 1995)

 

 


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